Meneuse de revue #24
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- Instant critique par l'ouvreuse le 30 juin 2009
I want you back
Le plus fameux transfomer s'en est allé la semaine où d'autres, pourtant moins suspectés d'aimer les chtis n'enfants, sont venus violer l'innocence des jeunes spectateurs à sec et en toute impunité.
Pas facile pour la rédac après de telles épreuves de retrouver ses esprits avant de balancer dans une bonne grosse meneuse de revue tout ce qu'il ne faut pas dire mais qu'il faut lire (penser à copyrighter ce slogan). On va essayer de faire avec.
AVEC
Ok ça c'est bon, maintenant on va essayer de faire la suite.
PARADOXE TEMPOREL
"Tiens, c'est bien la première fois qu'on s'intéresse à Star Trek..."
Tiens, ça ne nous étonne pas vraiment qu'Aurélien Ferenczi avoue en fin d'article qu'il aura fallu attendre quarante ans (40 !) qu'un téléaste élevé au rang de roi des geeks re-hype une série mythique pour que l'on daigne apprécier cet univers. Evidemment il lui est tout de même nécessaire d'y ajouter la sacro-sainte grille de lecture politico-prout-prout qui permet souvent de voir des messages là où ça arrange (et rarement où ça dérange) : "Kirk et Spock incarnent-ils respectivement les conceptions bushiennes et obamesques des relations internationales, pardon interplanétaires ?"
Constatant, ravi, que Gene Rodenberry avait prévu l'échiquier politique US de 2008, le journaliste peut se permettre de prendre son pied devant ce "paradoxe temporel sophistiqué" basique comme le plus élémentaire des paradoxes temporels. De leur côté les trekkies de Unificationfrance.com, qui n'ont pas attendu qu'on leur mette des flare de lumières plein les yeux pour s'intéresser à la saga, émettent quelques réserves :
"Ce film enchaîne en flux tendu une kyrielle d’invraisemblances, conduisant à un manque global de crédibilité. Et ce film pèche aussi et surtout par une pauvreté scénaristique et narrative, par une violation dramatique de l’esprit trekkien cultivé durant quarante ans, et accessoirement par des légèretés scientifiques indignes de l’habituelle rigueur trekkienne."
CAR C'EST CRÉTIN MAIS ÇA DÉTEND ?
AGORA
"J'ai l'impression d'avoir tourné Titanic !" s'est exclamée Hélène de Fougerolles en pleine tournée promo de Mutants. C'est ballot, de nôtre côté nous avons plutôt l'impression d'avoir vu Le Petit Baigneur. Qui a saboté les bandes ?
Très impliquée dans la défense d'un certain cinéma "de genre" français, l'actrice est même intervenue dans une discussion semi-privée d'un groupe Facebook concernant les Gérard du Cinéma. Extraits :
Jean-Max Mejean, Ã 14:02 le 13 mai
"Cyprien il le mérite bien, tant mieux, il est outsider toutes catégories confondues."
Hélène de Fougerolles, à 14:12 le 13 mai
"J'adore parce qu'apparemment ils ne l'ont même pas vu Cyprien !!! C'est facile de charcler, de juger ou de descendre les films… mais Stéphane Rose sinon t'as fait quoi ?... Tu m'as fait rêver quand ?... Et les gars !? Qu'est ce qui vous prends là ?...."
Jean-Max Mejean, Ã 14:16 le 13 mai
"Il n'empêche, moi je l'ai vu ce Cyprien, et il est bien nul ! Désolé."
Nassim Ben Allal, Ã 14:16 le 13 mai
"@Hélène de Fougerolles : parfaitement d'accord avec vous, c'est la tendance procès d'intention qui fait de plus en plus de mal à notre cinéma ! Et je sais de quoi je parle, je suis en plein montage financier de mon premier long, une comédie d'horreur...
Au fait, bravo pour Mutants ;)"
Cedric Wildenstein, Ã 14:18 le 13 mai
"Qu'est ce qu'elle a Cyprienne ? Et les gars conformez votre goût à celui de Fougerolles, il est exquis..."
Hélène de Fougerolles, à 14:44 le 13 mai
"Cyprienne elle t'emmerde !"
Cedric Wildenstein, Ã 14:54 le 13 mai
"Et moi je t'embrasse, et je soutiens ta cause : il faut effectivement plus de Semoun et Bigard dans le cinéma français... T'inquiètes ils penseront à toi !!"
Si on ne peut contredire l'actrice sur l'inanité évidente de cette parodie de parodie de cérémonie ni satirique ni pertinente que sont les Gérard du Cinéma (comme nous le soulignions le mois dernier), on déplore hélas encore une fois la récurrence de l'anathème "et toi t'es qui pour critiquer d'abord ?" qui commence autant à agacer qu'à terroriser tant il devient le seul et unique axe rhétorique de la majorité des débats, façon sournoise d'implorer à tout à chacun de fermer sa grande gueule tant qu'il n'a pas mis en boîte trois longs-métrages ou écrit la suite de Guerre et Paix.
Mais puisque c'est sur ce terrain là que veulent s'aventurer nos artistes, très bien, chaussons les crampons et allons-y : Hélène de Fougerolles, ne nous ayant jamais fait rêver, n'a absolument pas le droit de venir critiquer ce papier ni d'y répondre. Voilà .
En fait c'est simple la démocratie du XXIème siècle.
IL FATIGUE MICHAEL
C'EST CRÉTIN MAIS ÇA DÉTEND PAS VRAIMENT
Emouvante interview d'Olivier Mégaton sur DVDrama. Le site, pour s'excuser d'avoir démonté son dernier film, qualifie le cinéaste de "bombe du cinéma français" (sic). Le bougre en profite pour nous expliquer que si Le Transporteur 3 est mauvais ce n'est pas vraiment sa faute.
Non, c'est à cause du directeur photo Giovanni Fiore Coltellacci, qui a obligé le réalisateur et son étalonneuse à retravailler l'image "18 heures par jour" en post-production. Et les scènes d'actions accélérées, c'est à force de virer les photogrammes sabotés ?
Le ratage est également en partie dû au chorégraphe Corey Yuen : "Engager Corey Yuen que Jason Statham nous a imposé, c'est limite has been. Au début, on avait Alain Figlarz (chorégraphe sur Chrysalis et Babylon A.D.) avec lequel on avait travaillé pendant un mois. Il nous donnait ce qu'il n'avait pas pu faire sur La Mémoire Dans La Peau. J'ai fait quinze ans de boxe thaïlandaise et lorsque je vois certains mecs parler de combats, je me marre. Même si c'est inspiré des chorégraphies d'Alain, nous n'avons pas pu agir sur les trois scènes de combat. Quand tu engages Jason Statham, tu es obligé de travailler avec Corey Yuen. Ils ont le même agent et sont liés contractuellement".
C'est vrai, les scènes de tatanes de Chrysalis et Babylon A.D. posaient un chorégraphe... Comment le collaborateur de Jacky Chan peut bien rivaliser ? Au passage, il est fort dommage qu'on ait pas pu apprécier les chorégraphies refusées par la production de La Mémoire Dans La Peau.
Et pourtant, Olivier Mégaton annonçait fièrement qu'il serait "difficile de passer derrière Le Transporteur 3". Le cinéaste se ravise et accorde finalement que son film n'est pas vraiment aussi ultime que ce que ses deux précédentes œuvres classiques voire définitives, Exit et La Sirène Rouge, laissaient présager
Ha oui mais attention, ce n'est pas sa faute. Tout comme ce n'est pas sa faute si son humilité le mène à se comparer à Eastwood, Gray, Boyle et Fincher, ni à s'en prendre bien évidemment à son contradicteur :
"Je me dis à un moment : quelle est la frustration qui pousse le rédacteur à réagir de la sorte ?"
"Je veux bien qu'on me donne un cours de cinéma. Quand c'est David Lynch, je suis toute ouïe. Quand c'est un journaliste du Net, j'aimerai avoir une explication."
Pour se remettre d'une telle interview, le mieux est encore de se repaître des propos d'un vrai bon cinéaste, Fred Cavayé en l'occurrence, interrogé à l'occasion de la sortie en DVD de son formidable Pour Elle par Arnaud Bordas, toujours sur DVDrama.
LES CLEFS DE BAGNOLE
NOUS ON LES PRÊTE, LES NOTES
"Le plus souvent, les critiques sont les gardiens de l’ordre moral, des petits-bourgeois plutôt réacs qui comparent, palment, mesurent et donnent des notes (même les Inrocks s’y mettent sur leur site). A Cannes, ils ont sifflé Robert Bresson, Michelangelo Antonioni, Marco Ferreri, et plus récemment Lodge Kerrigan, Gaspar Noé ou Vincent Gallo."
Le "scandale cannois" de Antichrist mena Marc Godin de Bakchich à rédiger cette petite diatribe pas dénuée d'intérêt :
"A Cannes, tout le monde fait beaucoup de bruit pour avoir ses quinze minutes de célébrité. Malheureusement, les critiques aussi…"
RIEN AFFICHE
Drôle de coïncidence : les affiches de deux films français sortis le même jour comportent des détails de composition communs : un cercle derrière les héros (le ciel pour Bigard, les arbres pour Cécile de France), portant tous deux un objet dans la main gauche (valise / guitare) et vêtus de frusques religieuses. Sûrement un coup de l'inspiration Divine.
RIO NE RÉPOND PLUS
"Initialement prévue le mercredi 3 juin à 20h45, la diffusion du premier épisode de Fringe à été décalée au mercredi 10 juin à 23h10 après le crash du vol AF 447 reliant Rio à Paris. Le pilote de la série, intitulée Le Vol 627 débute par une scène de panique dans un avion pris dans un violent orage. Dans un communiqué, TF1 explique que montrer ces images mercredi, juste après le journal télévisé, aurait été trop dur."
L'express.fr – 3 juin 2009
Ainsi la diffusion de cet épisode "aurait été trop dur" ? Mais "trop dur" pour qui ? Pourquoi ? Chez L'ouvreuse, nous ne comprendrons vraisemblablement jamais cette nouvelle mode de censurer la fiction parce qu'elle ressemble à l'actualité du moment, attitude qui rejoint les réactions du type "un film violent rend violent", soit une confusion inconsciente entre la fiction et le réel (et d'abord à quand un débat sur les films gentils qui rendraient gentils ?).
Et pendant que TF1 prend soin de son spectateur en lui épargnant une fiction car trop con pour faire le distingo avec le drame vécu par deux cents inconnus, les différent journaux de la première chaîne de l'Hexagone se complaisaient dans des gros plans sur les familles endeuillées tout en montant en épingle le crash pour faire les choux gras de leurs diverses éditions. Et ça, ce n'était pas "trop dur".
Chez TF1 la fiction est donc déclarée "trop dure" pour le public. Par contre envoyer des journalistes sur un vol Paris - Rio pour filmer les turbulences du fameux Pot au Noir et faire vivre à travers eux les dernières heures des victimes, comme cela a été le cas lors de leur édition du 20H00 du 2 juin, c'est correct, c'est éthique. Ce n'est pas "trop dur".
Voilà la logique : du sensationnalisme assez gerbant dans ce qui doit être destiné à informer, à rapporter des faits réels, et du rachat de morale en supprimant une fiction qui a pour seul défaut de combler les besoins émotionnels de spectateurs qui n'iraient plus se rassasier de la catastrophe fictionnalisée par la maison.
CINEMATENDO
Sur Way Of The Pixel, des graphistes s'amusent à créer des captures de faux jeux vidéos NES adaptés de films cultes. On vous laisse les reconnaître.
LA PHILO SELON FRIEDRICH
Naïvement nous pensions que tout ce qui passait sur une chaîne nommé "Sci Fi" concernait les geeks, mais apparemment non, il faut une émission spéciale confiée fort logiquement à des "non-geeks".
Les médias mettant ce terme très hype à toutes les sauces (t'achètes un I-Phone ? T'es geek. Tu regardes une série sur TF1 (sauf les jours où les avions tombent) ? T'es geek. Tu bosses sur un PC ? T'es geek. Tu utilises un micro-onde ? T'es geek), nous nous posons la question de l'utilité de ce terme vidé de son sens, qui commence, pour tout dire, à nous sortir par les yeux. Un début de réponse :
Selon Nietzsche, voici la fonction des mots :
"Simplifier les phénomènes réels extrêmement complexes qui composent la pensée, de telle sorte que notre pensée nous devienne saisissable, qu'elle puisse être notée et communiquée par des signes." (Oeuvres Posthumes)
Oui mais voilà , quand on fixe un mot sur une idée, l'idée perd de sa force :
"J'ai saisi cette idée en passant et, vite, j'ai pris les premiers mots venus pour la fixer, de crainte qu'elle ne s'envole... Et maintenant, elle est morte de ces mots stériles ; elle est là , suspendue, flasque sous ce lambeau verbal, et, en la regardant, c'est à peine si je me rappelle encore combien j'ai pu avoir un tel bonheur en attrapant cet oiseau." (Le Gai Savoir)
Alors, mettre des mots sur les idées ou ne pas y toucher ? Un problème que l'Allemand résoud ainsi :
"Cette aspiration commune à l'apparence, à la simplification, au masque, au manteau, bref à la surface des choses (car toute surface est un manteau) est contrecarrée par une tendance plus noble à la connaissance, qui veut aller et va à la racine de la complexité des choses." (Par Delà Le Bien Et Le Mal)
Conclusion : faut continuer à utiliser le mot "geek", mais surtout continuer à le définir, à le creuser.
Ce qu'auraient pu faire les médias lors des 5712154 heures de programmes consacrées à la mort récente d'un homme-adolescent fasciné par les films d'horreur, de SF et de gangsters, acharné de travail pour sa passion, collectionnant les jouets, se vêtant à l'occasion comme un super-héros et unanimement déclaré roi de la culture populaire.
Mais comment utiliser un mot à bon escient quand on ne sait pas ce qu'il veut dire en dehors de son usage marketing ?
ALLEZ, AIDONS LES MÉDIAS A COMPRENDRE LE SENS DE "GEEK"
MAISON TÉLÉPHONÉE
"En adoptant une licence Creative Commons (by-nc), Yann Arthus Bertrand aurait pu laisser un milliard d’internautes remixer son oeuvre, en faire des montages alternatifs, plus adaptés à certaines cultures, à certaines situations écologiques, à certains endroits sur Terre, mais également plus adaptées à une diffusion virale du message, et toutes, bien évidemment, pointant vers l’oeuvre originale, lui assurant de facto une diffusion encore plus grande.
Mais force est de constater que le régime de copyright et l’appréhension qu’à Luc Besson de l’Internet se limite à y voir une télévision géante, un minitel 2.0."
Sur son site Fabrice Epelboin démontre que Luc Besson n'a toujours pas rattrapé son retard en droit. Il lui reste même pas mal de taf avant d'assimiler des subtilités telles que la différence entre "libre" et "gratuit". Allez Luc, on y croit à la session de septembre (puis en amphi tu vas bien nous dégoter une poulette pour Le Transporteur 4).
Et à tous ceux que l'opération de green washing qu'est ce remake de Baraka et de la trilogie Qatsi commence à gaver, nous conseillons d'aller écouter l'excellent Daniel Mermet qui démantibule le projet de A à Z dans son émission Là -bas si j'y suis. Soulignons un passage fort intéressant relatant comment ce genre de documentaire entretient une culpabilisation de l'individu pour mieux protéger le système économique, véritable coupable des dégâts exposés (système dont profite grassement François-Henri Pinault, mécène de la chose par le biais de son groupe Pinault-Printemps-Redoute). C'est toujours plus constructif qu'un discours naïf sur fond de choeurs liturgiques.
DEAD CAN DANCE
CHUTIER
- David Carradine nous a hélas quitté le mois dernier. Que pouvait-il y avoir de plus beau qu'un Darwin Award pour couronner une telle carrière ?
- Profitons-en pour signaler ce beau papier d'Arnaud Bordas sur le papa de Bill.
- A Cannes les frères Dardenne ont donné une leçon de cinéma. Non ce n'est pas une blague (quoique dans un sens…), et si vous doutez encore de leur influence sur leurs confrères, remémorez-vous ceci.
- Maniaque comme il est, vous pensez que David Fincher va retourner la fin de son film ?