Electroma

High robots

Affiche Electroma

Deux films au compteur et toujours aucune ligne de dialogue. Pourtant les Daft Punk ont des choses à dire. Mais comme le faisait remarquer l'autre, l'avantage du cinéma est qu'il y a des images ; et une image pouvant valoir moult mots... L'inconvénient est que ce soit deux musiciens qui doivent le rappeler aux cinéastes contemporains. Pour un Electroma ou un Locataires, combien de bandes ressemblent à des pièces radiophoniques filmées ? Trop.



Ces œuvres se font si rares que l'on s'empresse de prendre leurs plus simples points communs pour mieux les comparer. Ainsi, beaucoup rapproche la première mise en scène du duo de la Pyramide au
Gerry de Gus Van Sant. Mais si voyons ! Il y a deux personnages principaux qui marchent dans le désert pendant une grande partie du métrage ! L'analogie est évidente… Surtout évitons d'aller plus loin en soulignant qu'à part cette traversée du désert pédestre, ces films ont des thématiques totalement différentes et n'ont absolument pas les mêmes visées (dans Lifeboat, Le Lagon Bleu, Greystoke et Les Naufragés Du Poséïdon il y a un bateau qui coule, donc ils parlent tous de la même chose. J'aime bien cette logique, ça a le mérite de reposer). 

Electroma
 


Et combien même, pourquoi s'évertuer à créer artificiellement des liens avec d'autres créations alors que
Electroma se suffit largement à lui-même tant le discours est limpide, les images parlantes, le propos fort ? Peut-être est-ce d'ailleurs la raison : trop simple, trop évident, besoin donc de saturer inutilement un signal clair.
C'est bien dommage. Car venant des chantres de la musique post-moderne, gavant leurs compositions de citations, d'emprunts ou de samples, on pouvait s'attendre un énième "film-somme-hommage-référentiel-lol", que laissait un peu présager
Interstella 5555 avec sa forme invoquant la régression infantile. Mais il n'en est heureusement rien ici, Bangalter et De Homem-Chirsto optant pour une approche totalement épurée de leur Electroma, donnant ainsi une sacrée puissance aux tableaux qui composent cette odyssée cybernétique. Nul besoin donc d'aller chercher ailleurs ; ce qui est de plus contraire au thème du film : les héros robots cherchant à s'affranchir de la masse, il était logique que les Daft en fassent de même en réalisant.

Electroma
 

En nommant leur dernier album Human After All (humain après tout), et livrant une caricature de leur musique (le sample de Release The Beast répété pendant quatre minutes donne le tube numéro un du disque, Robot Rock), le duo ne faisait rien d'autre qu'exprimer sa lassitude et la pression pesant sur leurs épaules. Eux qui, cachés derrière leur masques de chiens ou de robots, ont toujours cherché à fuir la lumière, la rendent ici responsable de l'humanisation impossible de deux robots à leur image. Lors de cette scène bouleversante les masques humains des cyborgs fondent au Soleil, et c'est toute la tragédie des Daft qui s'illustre : ils ne peuvent redevenir ce qu'ils étaient, obligés qu'ils sont de restés cachés sous leur casque s'ils veulent survivre à la lumière, quitte à devoir affronter la tant redoutée… traversée du désert.

Aux délires multicolorés de
Interstella 5555 et de leurs clips s'opposent des images à dominante blanche. Aucun extrait de la BO n'est signé par eux. Ici, être un robot est la norme… Véritable négatif de l'univers musical des Daft Punk, Electroma devient ainsi une métaphore puissante et émouvante du parcours hors norme de deux artistes de génie qui annoncent haut et fort qu'ils sont prêts à s'autodétruire sous les feux de la rampe.
Peut-être est-ce une interprétation finale exagérée. En attendant, les images parlent d'elles-mêmes, et en restant strictement dans le domaine de la SF, elles n'en demeurent pas moins foutrement superbes.

8/10
ELECTROMA

Réalisateur : Thomas Bangalter & Guy-Manuel De Homem-Christo
Scénario : Thomas Bangalter, Guy-Manuel De Homem-Christo, Paul Hahn & Cédric Hervet
Production : Paul Hahn, Paul Perez Hahn, Tony Gardner
Photo : Thomas Bangalter
Montage : Cédric Hervet
Bande originale : Steven Baker
Origine : France / USA
Durée : 1h14
Sortie française : 24 mars 2007

Uniquement projeté le samedi à minuit au cinéma Le Panthéon, Paris 5ème (Métro Luxembourg).
Si vous n'êtes pas sur Paname, le DVD Z2 anglais sort le 19 novembre prochain.




   

Commentaires   

+1 #1 xavier 19-02-2021 15:39
film absolument incroyable , merci pour l'analyse.

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