Gérardmer 2009

Parce qu'on le Vosges bien

Affiche Gérardmer 2009

Du vin chaud, du latex, John Landis, la brasserie du Grizzli, des spectateurs esthètes applaudissant un meurtre à la hache : pas de doute, nous sommes à Gérardmer.



Du 28 janvier au 1er février dernier s'est donc tenu le 16ème festival du film fantastique de Gérardmer. Pour une fois nous sommes sortis de notre grotte, avons enfilé bottes et parka, pris une paire de chaussettes de rechange et zou, direction la montagne pour couvrir cet évènement "geek" et campagnard (pas facile à urban-bloguer quoi).

N'étant pas du genre à laisser le soin au rédacteur ayant le plus apprécié un film de le chroniquer, meilleur moyen pour pondre un dossier lisse, chiant et consensuel, nous avons opté pour le débat, chacun amenant son grain de sel sur les œuvres découvertes. Le menu est donc copieux, mais c'est pour le respect des coups et des douleurs baby.

Nous vous invitons ainsi à découvrir les impressions de nos envoyés spéciaux Macfly, nicco, Vendetta, Zug et D'Artomuffix, qui ont failli payer ce papier de leur vie.


LA SÉLECTION OFFICIELLE

THE BURROWERS de J.T. Petty (poisson)

Vendetta : Le film d'ouverture du festival ! Sorte de fusion entre western et film de monstres, The Burrowers (prononcez "browrrrs") souffre d'un mauvais rythme et réserve des moments d'humour involontaire. Le spectateur francophone est particulièrement gâté lors d'une séquence à pleurer de rire dans laquelle des indiens parlent soudainement français (enfin, "français" si on veut, hein), comme ça, sans raison particulière. Passée l'hallucination, le public hagard savoure à sa juste valeur LA réplique d'anthologie du film, à savoir : "Léé peti poissoonn, le piééége a paaa mawchéééé", devenue logiquement cri de ralliement pour le reste du festival. Dommage pour un casting intéressant, les trop rares Clancy Brown et Doug Hutchison (Eugene Tooms de X-Files, les mecs !). Bref, comme il l'a été bien résumé après quelques hectolitres de Leffe blonde, The Burrowers est une bonne idée sur le papier mais ne donne rien de bon dans l'exécution, un peu comme le communisme.

Macfly : Malgré l'imparable scène de dialogue qu'évoque Vendie, The Burrowers s'oublie dans l'heure. La faute à une mise en scène impersonnelle et à un personnage principal mou et sans aucun charisme. On est à la limite du DTV.

Zug : On est bien loin du Tremors au far-west que le pitch laissait présager. Peu d’images marquantes et un casting en or massif très mal exploité (Clancy Brown et Doug Hutchinson).

nicco : Pas vu, j'étais entrain de détourner un TER pour arriver à Remiremont. Mais je trouve qu'il est naze.

LA VÉRITÉ SORT DE LA BOUCHE DU PUBLIC
"Léé peti poissoooonn !!!!!"


SAUNA de Antti Jussi Annila

Vendetta : Deuxième film de la compétition officielle, Sauna est également le premier représentant de la forte délégation scandinave au festival (avec Manhunt et Morse). Déjà échaudé par le film d'ouverture, je suis entré dans la salle assez perplexe et fort dubitatif, ayant eu le malheur l'année dernière de subir (il n'y a pas d'autres mots) le premier film du réalisateur de Sauna, Jade Warrior, mélangeant allègrement wu xia pian, histoire de réincarnation et effets matrixiens. Or ici, rien de tout ça, juste un film racontant une bonne histoire avec d'excellents acteurs et une réalisation au couteau. Bref, du tout bon. Certains ont regretté l'hermétisme du scénario. J'y ai d'avantage vu de l'exigence envers les spectateurs. Maintenant, il n'est pas étonnant que les fans de gore ne s'y soient pas retrouvés. Une excellente surprise.

Macfly : Un bon point de départ pour ce film qui prouve que les scandinaves, contrairement aux français, savent et osent faire du film de genre en piochant dans leurs particularités historiques et culturelles. Seulement voilà, ce n'est pas très nerveux, pas très intéressant, et surtout un peu trop auteurisant pour moi. On fait passer le propos au Caterpillar avec des dialogues qui expliquent tout quinze fois. On aurait préféré que les thématiques n'aient pas besoin de ça pour émerger.

Zug : On navigue entre onirisme et film de fantômes avec un fort contexte historique sans que le réalisateur parvienne à privilégier un mode narratif. Reste que le film bénéficie d’une photo magnifique, d’une forte identité visuelle et d’un très bon générique de début.

nicco : S'tu veux j'attendais un taxi là en fait :
La gare de Remiremont


GRACE de Paul Solet

Vendetta : Rapidement présenté par le réalisateur qui avait fait le déplacement à Gérardmer pour l'occasion, Grace commence par une scène... de cul. Je vous voir venir d'ici, mais il faut vous décevoir : filmée de manière très plate et mécanique, le spectateur, même érotomane, en tirera à peu près la même excitation que devant une rediffusion des Chiffres et des Lettres de 1986. Et en fait, c'est bien le problème de Grace : on s'emmerde. Parce que regarder une jeune mère de famille changer des couches et donner le biberon ou le sein (sans voir le sein, bien entendu, sinon ça ne serait pas drôle), c'est supportable cinq minutes. Pas 50. Dans le même style, on recommandera donc plutôt de revoir le très bon It's Alive de Larry Cohen, dans lequel il ne faut pas subir une heure vingt de non-action avant qu'il se passe quelque chose.

nicco : Premier film vu, et premières dissonances car je trouve, contrairement à mon camarade plus haut, que Grace est précisément intéressant et précieux car il ne montre ni n'explique quoique ce soit. Certes, tout ce qui attrait aux rapports humains est froid et distant, mais c'est pour mieux contraster avec la relation exclusive qui lie (Jean-Claude) la mère à l'enfant : par exemple le mari est présent seulement en tant que mâle reproducteur. Une fois la tâche accomplie, il meurt dans un accident sans qu'on nous prenne la peine de nous le signaler, ni de nous montrer la veuve le pleurer. A l'image de la scène pivot faisant basculer le métrage par le biais d'un seul plan de quelques secondes, rien n'est ici explicité, et pourtant des tonnes de choses sont dites. Plus qu'une version intimiste du Monstre Est Vivant de Cohen, c'est surtout une version féminine (l'héroïne est bisexuelle), et bien plus profonde.

Zug : La force de la volonté d’une femme voulant un enfant plus que tout au monde. Pour elle, l’homme n’est qu’un reproducteur, et la mort du nourrisson une simple épreuve à surmonter. Un premier film à la narration plutôt bien maîtrisée aussi intriguant que touchant. Et aborder le désir de maternité sous l’angle de l’obsession compulsive est aussi inhabituel qu’osé.

Macfly : Long, très long film lorgnant du côté de certains Polanski. Certes les éléments sont amenés avec classe et simplicité, mais passé l'exposition, les quarante minutes qui suivent sont tout bonnement interminables, samplant la même scène en boucle sans faire évoluer la dramaturgie : toutes les cinq minutes, l'héroïne donne le sein à son gosse et on se rend compte qu'il lui a pompé le sang. Premier film d'une longue série avec une femme enceinte et/ou des enfants tueurs, Grace est presque sauvé par son suspense final qui, même s'il est monté avec des moufles, réveille le spectateur assoupi.


MANHUNT de Patrik Syversen

Vendetta : Si j'étais feignasse (et je tiens à préciser que je suis effectivement assez feignasse en général), je dirai que Manhunt peut se résumer en peu de choses. A un concept, en fait : jeunes norvégiennes en short. Mais bon, on va quand même faire un petit effort. Situé dans les années 70, Rovdyr (le titre norvégien de Manhunt, qui pète bien plus que ce dernier d'ailleurs) ne cache pas une seule seconde ses influences. Oui, le réal a aimé Massacre A La Tronçonneuse, il va jusqu'à intégrer le même van Volkswagen ainsi que l'auto-stopper (ici, stoppeuse... NORVÉGIENNE, ne négligeons pas ce détail vital) qui déclenche le problème. Oui, le réal a également fort apprécié Délivrance et n'hésite pas une seconde à faire manier (très mal, d'ailleurs) un arc à flèche par son héroïne. Néanmoins, la chasse à l'homme du titre est correctement troussée. En gros, le film nous donne ce qu'on est venu voir. Et quelque part, c'est déjà pas mal.

nicco : Un beau cas d'école de mise en scène hasardeuse comme je les aime : jusqu'au premier meurtre, on croit légèrement à ce survival norvégien malgré la banalité de l'introduction (Massacre à la Tronçonneuse comme unique objet de référence de l'auteur donc, jusqu'aux personnages identiques). Or le découpage de cet homicide inaugural démontre clairement que Syversen ne pouvait s'affranchir de son modèle : toute la scène (et à fortiori le film) est orientée vers la réaction et non sur la montée en tension. Alors que la dramaturgie en place demandait à s'attarder sur le frère de la jeune fille sur qui on venait de tirer au niveau des chevilles (donc plans sur le frère surveillant le déplacement du tueur se baissant vers la victime, angoisse montante lorsqu'il s'approche de la nuque un couteau à la main, engendrant petit à petit l'idée horrible de ce qu'il allait probablement se produire), le réa enchaîne des gros plans agencés sans aucun point de vue, nous montre la main du tueur, la nuque de la victime dans laquelle vient se planter la lame, et finit avec un gros plan sur le frère qui se met à hurler d'un coup parce que bête comme il est, il n'avait pas compris durant les trente secondes précédentes ce qui allait se passer.  

Macfly : Je rejoins mes camarades. Manhunt dresse la liste exhaustive de tout ce qu'il faut faire pour rater son slasher : personnages qui se jettent dans la gueule du loup sans raison ("Tiens, et si j'allais me réfugier dans le camp des méchants pour être sûre de me faire tuer ?"), armes qui apparaissent comme par magie quand les personnages en ont besoin... Prévisible de bout en bout, Manhunt est un mauvais film. Mais il y a des norvégiennes en shorts, et ça vaut bien trois points.

Zug : La seule originalité du film est le lieu d’action, la Norvège. Pour le reste, déjà vu ailleurs et en mieux réalisé. Entre incohérences, humour au second degré involontaire et absence de tension, Manhunt est un beau pétard mouillé.

LA VÉRITÉ SORT DE LA BOUCHE DU PUBLIC
"Tiens, c'est encore Hamburger Film Sandwich."

Manhunt
Manhunt de Patrik Syversen



SPLINTER de Toby Wilkins

Vendetta : C'est forcé, chaque compétition se doit d'avoir sa série B sans prétention au programme. Et bien cette fois-ci, c'était Splinter. Précisons d'emblée que ce film n'a rien à voir avec Les Tortues Ninjas (cette vanne est effectivement nulle mais est strictement obligatoire lorsqu'on évoque ce film : vous pourrez d'ailleurs la retrouver dans TOUS les autres comptes-rendus du festival à travers Internet... Oui, tous, on a vérifié). Huis clos sans imagination ni originalité, Splinter se laisse oublier aussitôt sorti de la salle. Le spectateur indulgent retiendra peut-être une scène d'amputation surréaliste réalisée à l'aide d'un cutter et d'un parpaing, mais rien n'est moins sûr.

nicco : Amputation au cutter et parpaing par le neveu de Joey Tribiani, effectivement c'est surréaliste. D'autant plus que dans la scène suivante l'amputé tape la papote clope au bec comme si on venait de lui enlevait une écharde du pouce. Entre incohérences, découpage peu clair, idées piquées chez les grands et avarice en scènes excitantes, Splinter ne mérite rien d'autre que d'être relégué au rang de série B pour cul de pet'.

Macfly : Évidemment, un gars qui se fait trancher le bras ne peut pas être en bon état de santé dans l'heure ; évidemment, le film démarre très mal (image vidéo un peu moche, exposition peu convaincante) ; évidemment, le désormais traditionnel secouage de caméra cache-misère dans les scènes à SFX est relou. Mais Splinter a des personnages attachants, un scénario qui n'invente rien mais qui tient la route, des acteurs convaincants. Et surtout c'est un huis clos dans une station service avec des monstres à l'extérieur, et je suis très client de ce genre de trucs.

Zug : Des références à Evil Dead ou The Thing, mais pas envahissantes, des personnages bien caractérisés (ce qui est plutôt inhabituel dans ce genre de série B) et un rythme plutôt soutenu en font un film sympathique et idéal pour une soirée pizza/bières entre potes. Oui, on aurait dû écouter nicco et apporter quelques canettes…


THE MIDNIGHT MEAT TRAIN de Ryûhei Kitamura

Vendetta : Sans aucun doute le film le plus attendu de la compétition officielle. Adaptation d'une nouvelle de Clive Barker, retour de Ryûhei Kitamura à la réal, réputation... Le public était effectivement chauffé à blanc et plus encore au vu des réactions pendant la projection. On rassurera les curieux : oui, The Midnight Meat Train est effectivement un bon film, qui mérite sans aucun doute la vision. Oui, Vinnie Jones est très impressionnant en tueur muet et impassible. Oui, mille fois oui, la bagarre finale à l'intérieur du métro est totalement jouissive. Mais il manque à ce film un petit quelque chose pour être un réel classique de l'horreur.

nicco : Il manque un réa selon moi, c'est un grand petit quelque chose. Et même si j'apprécie les mises en scène foutraques dans les films foutraques, je me demande encore comment on peut prendre son pied en matant une scène de baston entre un tueur impressionnant et le héros tandis que la caméra fait des loopings autour d'un wagon en CGI dans lequel se déroule ladite bagarre. Et la tendance à la pose de Kitamura est franchement ridicule des fois (d'autant plus lorsqu'elle contraste avec les plans où la caméra est balancée au bout d'une corde). Reste l'imagination de Barker, qui sauve ce film du tout-venant.

Macfly : A vue de nez le film le plus friqué de la sélection, The Midnight Meat Train n'en reste pas moins bancal. Le principal problème est l'incapacité du réalisateur à choisir entre le thriller urbain sérieux à la Se7en avec ambiance poisseuse et plongée dans les bas-fonds, et film gore rigolo avec mouvements de caméra cartoonesques à la Evil Dead 2. En gros, comme il ne sait pas ou aller, Ryûhei alterne l'un et l'autre une scène sur deux. Ça aurait pu être sympa, mais on sent bien que tout ça n'a pas vraiment été réfléchi.

Zug : Adaptation très réussie de la nouvelle éponyme. L’univers de Barker et les expérimentations visuelles de Kitamura cohabitent plutôt bien. Film très attendu et qui n’a pas déçu.


DEADGIRL de Gadi Harel & Marcel Sarmoento

Vendetta : Deux lycéens transforment une morte-vivante en esclave sexuelle privée. Avec un pitch pareil, on pouvait s'attendre à un truc sortant du commun. Hélas, c'est la déception à l'arrivée. En gros, Deadgirl, c'est un peu comme si Gus Van Sant voulait se lancer dans l'horreur sans le côté gay. Je ne suis pas très client. Les acteurs sont plutôt bons, ceci dit. Mais les deux réalisateurs se regardent un peu trop filmer et auraient pu couper pas mal d'éléments inutiles. Bref, la réflexion prédominante à la sortie de la salle s'apparentait à "tout ça pour ça". A noter, le fait remarquable de la séance : absolument aucun problème technique n'a été constaté pendant la projection.

Zug : Une esclave zombie qui excite la libido de jeunes lycéens en marge. Ou comment pousser la libération sexuelle dans ses derniers retranchements.

Macfly : Sympathique petit film, certes un peu laid et manquant de rigueur, mais basé sur une bonne idée et dégoupillant pas mal des attentes du spectateur (on s'attend à voir du torture porn, et en fait on se retrouve avec une réflexion sur nos désirs inassouvis). Et puis un film où l'on humilie des sportifs ne peut pas être un mauvais film.

nicco : Deadgirl est un film étonnant dans ses bascules comico-horrifiques et dans la manière frontale avec laquelle les auteurs abordent leur sujet, qui n'est pas la sexualité adolescente, la bestialité, la misogynie ou je ne sais quel autre thème projeté par l'inconscient du spectateur, mais tout simplement l'exclusion et le désir de posséder celui qui nous rejette. En conséquence le métrage parle de l'ego, de machisme et de fierté, et pour y arriver les deux jeunes auteurs n'hésitent pas à emprunter une voie rare de nos jours : le récit en trois actes développés (et j'insiste sur "développés") sur 90 minutes. Chaque axe, chaque arc scénaristique trouve sa raison d'être au sein d'une seule et unique dramaturgie prenant toute sa force dans son épilogue. Sous ses oripeaux de Nekromantik chez Larry Clark, Deadgirl démontre la violence des relations adolescentes, le tout avec l'air de pas y toucher, ce qui est toujours la marque des bons. A ranger dans le haut du tableau de cette sélection aux côtés de Morse et Grace.


MORSE de Tomas Alfredson

Vendetta : Bien chauffé par un Zug enthousiaste, j'y allais très curieux mais craignant fort d'être déçu. Ne tournons pas autour du pot : Morse est bien LE film du festival. Un chef-d'oeuvre, un vrai, qui a laissé la salle dans un silence total jusqu'à son dénouement. Je ne vais pas commencer à m'étendre ici, un papier suivra pour expliquer tout le bien que j'ai pensé de ce film.

nicco : Le film de vampire qu'aurait réalisé Shyamalan. Là, tout est dit (cette séquence de la piscine, mon dieu...).

Macfly : "Le film de vampire qu'aurait réalisé Shyamalan". Effectivement, tout est dit : comme chez Shyamalan, c'est pas dénué de bonnes idées (la scène d'invitation explore une zone peu explorée du mythe des vampires.) Mais comme Shyamalan, c'est étiré en longueur jusqu'à plus soif. Quand un personnage se déplace, c'est forcément à deux à l'heure. Quand deux personnages se parlent, il y a toujours un silence désespérément long entre chaque réplique. Chacun son truc, mais moi ça me tape sur le système.

Zug : On pouvait légitimement craindre le film de festival beau, chiant et hermétique. Au contraire, le rythme langoureux favorise les échanges de regards, les gestes tendres et les non-dits entre Oskar et Eli, plus explicites que tous les dialogues possibles. Une exploration singulière du thème vampirique qui s’interroge sur ce que l’on est prêt à faire par amour : à manger un bonbon sachant que l’on sera malade, à pénétrer dans une pièce sans y avoir été explicitement invité, à tuer.

D'Artomuffix : Filez-moi les rushs et un sandwich, je vire une petite demi heure vite fait et en route pour l'Oscar.

Morse
Morse de Tomas Alfredson



HANSEL ET GRETEL de Yim Phil-sung

Vendetta : Le dernier film de la compétition officielle. J'avoue, je craignais fort la vision de ce film. Unique production asiatique du festival (ce qui peut aussi bien vouloir dire le pire que le meilleur), très long (quasi deux heures, ce qui en fait le plus long des films en compétition) et dont l'apparent sujet est casse-gueule par excellence (les contes de fées... Rappelez-vous de Shrek et tremblez), Hansel Et Gretel risquait fort de clôturer le festival de la même manière que celui-ci avait commencé : dans la médiocrité. Sauf que pas du tout. C'est même tout le contraire : bien construit, réussissant le tour de force d'être selon les moments fort drôle ou carrément dramatique tout en étant rempli d'une émotion réelle et non frelatée, Hansel Et Gretel est une petite pépite remplie de sensibilité qui méritait sans doute mieux que de repartir les mains vides du festival.

nicco : J'en attendais également pas grand chose principalement à cause du pénible souvenir qu'était Antartic Journal. Or Hansel Et Gretel se révèle être une des plus belles réussites du genre pour l'époque. La superbe direction artistique permet à cette variation sur le conte de rendre à la fois crédible et merveilleux les pérégrinations du héros et des enfants. Le propos est classique mais si bien agencé, si bien justifié à travers les divers pivots des personnages qu'il trouve ici le relief et la fraîcheur qui lui font tant défaut dans les productions contemporaines analogues. Dommage, vraiment dommage que l'auteur cède à la mode du "j'explique tout, mais TOUT, je ne laisse aucune zone d'ombre, je sais ça gâche la magie mais je le fais, même si ça me prend 40 minutes." Donc voilà, faut aimer les films dans lesquels le réa passe un tiers du métrage à saboter tout ce qu'il a mis en place précédemment. La fin est tellement interminable qu'on a peur que le freeze frame de conclusion s'anime de nouveau. Qu'il change de monteur.

Zug : Visuellement magnifique mais trop explicatif. Les différents éléments disséminés étaient suffisamment explicites. De plus, la fin traîne en longueur, comme si le réalisateur lui-même éprouvait les mêmes difficultés que son héros à quitter cet univers. Le film demeure cependant une jolie découverte et une très bonne surprise.

Macfly : Si on peut effectivement reprocher à Hansel Et Gretel des longueurs dans sa conclusion (le réalisateur semblant être impliqué au point d'avoir du mal à lâcher son histoire), il est difficile de résister à la puissance émotionnelle qu'il véhicule. Ce poignant conte pour adultes qui n'arrivent pas à grandir, baigné dans une atmosphère irréelle, propose à son spectateur de multiples interprétations (les personnages masculins représentent-ils les différents pères que pourrait devenir le héros ? Les enfants sont-ils les enfants en lui qu'il doit abandonner pour devenir un adulte et repartir à zéro avec un livre de contes rempli de pages blanches ?). Doté d'une lumière et de cadrages sublimes, d'acteurs tous excellents, et de petites touches d'humour bienvenues venant colorer les séquences les plus ténébreuses, Hansel Et Gretel évoque certains films de Guillermo Del Toro. Sauf qu'avec son propos plus "brumeux" (impossible de vraiment résumer ce qu'il a voulu dire) et son exceptionnelle palette d'émotions, le coréen réussit là où le mexicain a toujours échoué. De loin le meilleur film de cette édition de Gérardmer.

D'Artomuffix : Hmmmmm, manger des gâteaux...

Hansel et Gretel
Hansel Et Gretel de Yim Phil-sung



LE GUIDE DU CINÉPHILE FANTASTIQUE
Ha ! Qui n'a jamais fait face au regard inquiet de l'autochtone à qui l'on vient de demander "Ho cousin ! Comment qu'on y va à ton Gérardmèreuh là ?". Pour comprendre l'air dédaigneux de son interlocuteur vosgien, il faut se mettre à sa place : on ne dit pas "Gérardmèreuh", mais "Gérardmai", voilà tout. Et pourquoi donc ? Tout simplement en hommage à un ancien prince du coin, Gérard (ou Géraud, on ne sait plus trop), qui prenait un panard pas croyable à confectionner des "maix", ces maisons avec de beaux jardins sans nain. Lorsqu'il décéda, on décida que le village s'appellerait "le jardin de Gérard", et les déformations patoises feront le reste.
C'est qu'on apprend des trucs dans les taxis, même quand Les Grosses Têtes sont finies.


THE BURROWERS FROM MARS


Mars Needs Women de Larry Buchanan (1966)


COMME ÇA CHEF ?
En feuilletant le guide officiel du festival (4 euros l'exemplaire, heureusement on avait la Gold de l'ouvreuse), nous avons pu voir de plus près de quoi était composé le jury chargé de la tâche titanesque d'apprécier les différents longs-métrages en compétition :
Jean-Christophe Grangé... moui... Natacha Régnier... ça peut être sympa... Bérénice Béjo... mignonne... Fabrice Du welz... ça colle... Pierre Mondy... mmm... heu... ppp...oui, heu… HEIN ?
Pierre Mondy ! Le chef Chaudard en personne !! La seucla. Mais à en croire la filmographie du guide ("sélective" nous précise-t-on), Pierre Mondy n'a pas joué dans l'immortelle saga de La 7ème Compagnie… Pierre, aurais-tu honte de ton passé ? On se permettra tout de même d'ajouter que quitte à filtrer ta filmo, t'aurais aussi pu laisser de côté Un Homme Et Son Chien d'Huster, non ? Enfin bon, c'est toi qui vois.

Passons. Car une fois cet impardonnable oubli constaté, une question s'est vite imposée à notre esprit : "Mais bordel qu'est-ce que Pierre Mondy fout dans un jury de festival de films avec des ados qui démontent des zombies à gros seins ?" (là on la sort avec nos mots à nous). Notre curiosité éveillée, nous avons effectué un immense boulot d'investigation pour retrouver les compositions des jurys précédents, d'autant plus puissante comme entreprise que nous n'avions pas Internet dans le chalet (ce qui a d'ailleurs forcé certains d'entre nous à une cure de désintox improvisée avec à la clé convulsions matinales façon Nicolas Cage dans Leaving Las Vegas) (nd nicco : cinq jours sans lire mes mails, cinq).
Résultat : Pierre n'est qu'une étoile parmi la voie lactée des éminences cinéphiliques ayant honoré de leur présence le village vosgien et rehaussé de leur charisme le jury du festival. Jugez plutôt :

1995 : Florent Pagny, qui, n'en doutons pas, aura eu à cette occasion l'opportunité d'exercer sa légendaire liberté de penser
1997 : Mimie Mathy ; certains objecteront que Joséphine, Ange Gardien appartient au fantastique. Et le drame c'est qu'ils n'auront pas tort
1998 : Vanessa Demouy ; mais si, rappelez-vous, Classe Mannequin ! Quoique en écrivant ces lignes, on ne peut s'empêcher d'aller rechercher sur Google quelques photos de la demoiselle et de constater avec étonnement qu'elle aurait pu faire une Lara Croft saisissante de ressemblance, et là, on rigole déjà beaucoup moins ! (il y avait même une grosse rumeur à l'époque)
1999 : Laurent Gerra et Johnny Halliday ; la priorité numéro une était d'amener des experts en cinéma fantastique, pas de créer du buzz
2000 : Pierre Mond... NON ! Et si. Truc de fou. L'inoxydable, l'indomptable, l'inimitable, l'inusable, l'insubmersible Pierre Mondy avait déjà été membre du jury l'année du Millenium. Respect.
2001 : Alain Chamfort et Serge Lama ; on ne peut que tenter d'imaginer les conversations qu'ils ont pu partager avec Juliette Lewis et Bill Pullman, également membres du jury (" Bien, gros ? Comment je kiffe... Dis tu poses ton blase sur mon coffret ID4 ? ")
2004 : Michel Delpech, qui aura peut-être essayé de chanter Pour Un Flirt à Cécile de France, présente cette année-là
2007 : Charlotte de Turckheim ; mais là, on est carrément médisant vu que la filmographie de notre amie Charlotte contient un authentique monument du gore, la preuve. Ah ! On fait moins les moqueurs à présent (en même temps, Les Aristos c'était gore aussi).
2009 : Outre vous-savez-qui, on a également pu croiser Véronique Jeannot accompagnée pour l'occasion de son toutou (un peu comme nous avec D'Artomuffix, sauf qu'il ne fait pas de bruit quand on lui marche dessus pendant les proj', lui)

Aura également été aperçue à l'édition 2009 une candidate de Koh Lanta pour représenter Sci-Fi, partenaire de la manifestation (ne comptez pas sur nous pour vous dire qui, nous ne regardons pas ces fabuleux programmes) (nd nicco : c'était Clémence de Koh-Lanta 5 ^^).

Forte de ces informations, la rédaction de L'ouvreuse tente d'anticiper le choix des membres du jury pour l'édition 2010. Révélations exclusives :
- Louis Garrel
- Linda de Souza
- Corbier
- Elodie Bouchez
- Le chien de Michel Drucker
- Gérard Majax
- Une des tentatrices de L'Ile de la Tentation 2004 (la rousse qui avait des gros seins)
- Gary Coleman
- Le distributeur de soda à l'entrée du cinéma espace LAC
- Président du jury : George Lucas (tant qu'à prendre des non-spécialistes du genre, autant en choisir un qui a fait ses preuves).


HORS COMPÉTITION
Les films qui avaient des baskets et n'ont pas pu rentrer dans l'officielle.

FROM INSIDE de John Bergin

Vendetta : Seul film d'animation du festival... enfin, "animation"... disons que c'est "fait" avec des dessins, parce qu'accoler le terme d'animation à ce truc, c'est un peu comme si Verne Troyer décidait de se lancer dans la NBA : une lourde erreur de jugement. Revenons au film. En fait, là, je dois humblement avouer que je ne trouve pas les mots. Je ne trouve plus les mots. A la fin de la projection, il ne reste au pauvre spectateur n'ayant pas encore quitté la salle (en gros : un héros surhumain au sens nietzschéen du terme) que le vague sentiment d'avoir survécu à la première tentative de dépasser le concept humain de nullité. Strictement rien à sauver de ce sinistre navet, dont la prétention insupportable n'a d'égale que la laideur repoussante. Les crédits nous apprennent deux choses. La première, les rôles de réalisateur, de producteur, de scénariste, de chef-opérateur et de monteur sont tous tenus par le même homme. La seconde, le nom de cet homme. A côté des grands fléaux de l'humanité vient donc se ranger fièrement le nom de John Bergin (juste en dessous de celui de Monique Pantel).

Zug : Quand 1h11 paraissent une éternité…

Macfly : Lente plongée dans le néant cinématographique et les tréfonds de l'aberration graphique, les 71 minutes de pessimisme forcé d'ado de quinze ans en paraissent facilement le triple. From Inside est de loin le pire film de Gerardmer 2009.

nicco : Gare de Remiremont, sa locomotive :
La loco de Remiremont

LONG WEEKEND de Jamie Blanks

Vendetta : Par Jamie Blanks, le réalisateur de Urban Legend (avec Rebecca Gayheart tout de même !). Long Weekend reste une énigme. Il est selon moi impossible que Jamie Blanks ait été sérieux en tournant ce... truc. Jugez plutôt : un film dans lequel les grands moments sont 1) une attaque d'aigle filmée en vision subjective ; 2) un lamentin se baladant plus vite que le Road Runner, mais uniquement quand on ne le regarde pas ; 3) des fourmis planifiant une attaque-éclair vicieuse contre les jambes de l'héroïne alors qu'elle veut pique-niquer (c'est bien la seule chose qu'elle niquera, d'ailleurs, au grand désespoir du personnage du mari) ; 4) la découverte d'un morceau de barbaque périmée dans un frigo-box... bref, un film avec des climax aussi insoutenables peut-il réellement être pris autrement qu'à la rigolade ? On ne pourra que remercier le projectionniste, qui par pur élan de sympathie envers les pauvres spectateurs en train de lentement sombrer dans un coma emmerdilique, a rallumé la lumière dans la salle et interrompu la projection du film. On le remerciera par contre beaucoup moins d'avoir relancé le film seulement quelques instants plus tard.

Zug : Blanks a aimé Solitaire de Greg McLean. L’ouverture, avec ses paysages grandioses, est étrangement similaire, de même que le thème de la préservation du territoire face au citadin. Sauf qu’ici nous avons droit à un lamantin en lieu et place du crocodile géant. Au moins cela nous aura bien fait rire !

nicco : Les lamantins m'ont toujours fait peur, alors voilà, j'ai kiffé ce qu'il faut quoi... Bon, on ne sait pas trop ce qui se passe (la nature se venge, ok, mais quid des amis qui n'arrivent jamais, des flashbacks, de la famille noyée, etc. ?), mais cela participe à l'ambiance. Peut-être à revoir lors d'un moment plus approprié (au calme, quoi).

Macfly : Joker mauvais goût : j'avoue, je n'ai pas détesté ce film. Ok, c'est complètement crétin et ça pourrait être produit par Greenpeace, mais j'aime bien comment sont posés les problèmes de couple des personnages, et je trouve le décor exotique et original. En plus on rigole bien quand la nature se venge, même si ce n'est pas fait pour.


REPO! THE GENETIC OPERA de Darren Lynn Bousman

Vendetta : En fait, Gérardmer, c'est un peu comme la Samaritaine, il y a tout ce que vous voulez. Même des musicals. On a un peu peur en entrant dans la salle, le nom du réalisateur, Darren Lynn Bousman (Saw II, Saw III, Saw IV... Du lourd) n'est pas franchement pour nous rassurer. Mais on avait tort. Ce n'est pas de la peur qu'il fallait ressentir, c'est carrément de la terreur. Un musical, c'est un peu comme un soufflé : très dur à réussir. Et une chose est sûre, après avoir vu Repo! The Genetic Opera, j'irai jamais manger chez Bousman (sauf des Saw VI, à la rigueur). Passé la gêne de voir Paul Sorvino jouer dans un film aussi laid (qu'est-ce qui t'as pris Paul ?), il faut au spectateur une bravoure sans égale et des nerfs d'acier pour supporter les NONANTE-SEPT minutes (en disant nonante, vous le captez, que ça dure longtemps ? oui ?) du film présenté devant ses yeux à l'agonie. Tout ça pour une séance de minuit. Un rare sourire du film : la présence de Paris Hilton qui perd (littéralement) la face au cours du récit. Une tentative d'auto-dérision de la part de la starlette ? Pas sûr. En même temps, on s'en fout un peu, non ? Si.

Zug : Dire que l’on a sacrifié la séance de 22h de Bad Biology pour récupérer un peu et revenir en forme se taper l’opéra de Bousman…

nicco : Du repos, c'est ce qu'il faut en effet après avoir vu ce Sweeney Todd à la sauce Evanescence. J'ai préféré Mamma Mia!, c'est dire. Accordons à Bouseman le mérite d'avoir réussi à rendre l'univers plutôt intéressant de Repo! aussi moche que la bande son à grand coup de glow et autres triturages en post-prod. Un vrai esthète cohérent de bout-en-bout.

Macfly : A la fois complètement nul et assez attachant, ce musical-métal-gore a un seul mérite : être un vrai OVNI. Repo! Ressemble parfois au génial quoique beaucoup moins trash épisode de Buffy : Once More With Feeling (on retrouve d'ailleurs un des acteurs de la série), mais en quasi insupportable. L'intention est bonne, mais tout le monde ne s'appelle pas Joss Whedon.

nicco : Ha ! Si seulement Whedon pouvait se contenter de produire des musical...


EN QUARANTAINE de John Erick Dowdle

Vendetta : Première chose : je ne sais pas trop ce qui est passé par la tête aux organisateurs du festival de mettre au programme ce film alors que Jaume Balaguero (réalisateur de vous savez quoi) est président du jury des longs-métrages. Tentative d'humour ? Provocation ? Appât de la hype ? (qu'on le veuille ou non, En Quarantaine était un des films les plus attendus du festival) Peu importe après tout. C'est probablement désolant de le dire, mais non, En Quarantaine n'est pas mauvais. Attention, ce n'est pas bon non plus. C'est là, c'est tout. On notera une chose que certains considéreront comme un plus : l'absence du fast rewind qui en avait dérangé quelques-uns dans l'excellent film original (je suis obligé de dire le titre ? ok : [Rec]). Mais bon, pour ceux qui comme moi n'avaient pas été dérangés plus que ça par ce détail, pas grand chose de neuf à se mettre sous la dent. Et puis, Angela Vidal, ça se prononce tellement mieux en espagnol... En gros, [Rec], c'est le plat préparé avec amour par votre grand-mère. En Quarantaine, c'est une boîte de conserve achetée à l'Aldi du coin. Y en a qui aiment. Pas moi.

Zug : Loin d’être du niveau de l’original mais se laisse regarder sans déplaisir mais également sans aucune tension. Expurger le rewind de [Rec] est loin d’être une amélioration. D’une logique implacable - la présentatrice veut être sûre que la scène est bien "en boîte" - cette séquence est parfaitement représentative de l’importance accordée à l’image dans nos sociétés contemporaines. L’évènement, la "mort" de la zombie, ne pourra être considéré comme réel ou ayant effectivement eu lieu qu’à partir du moment où l’on (la journaliste) pourra re-voir jouer la scène. D’autre part, cette seule scène relève d’une intéressante mise en abyme du cinéma lui-même (plus généralement de la fiction), seul habilité à faire se re-lever les morts. Enfin, ce rewind a un énorme impact émotionnel puisque l’ellipse, ou plus prosaïquement le trou, ainsi créée dans la matière filmique même, augmente de manière incroyable le degré de tension. Que se passe-t-il le temps que les deux personnages revoient la scène ? A quoi s’attendre une fois que le temps de la fiction aura repris son cours ? Et des questionnements similaires, [Rec] en regorge, au contraire de son remake qui laisse totalement indifférent.

Macfly : Comme beaucoup, je m'attendais à la purge, mais j'ai été agréablement surpris de voir un film plus que correct. Certes moins bon que l'original ([Rec] se servait bien mieux de la mise en scène, était plus créatif, et était tourné en vidéo), mais qui corrige effectivement certains problèmes de la version ibérique.

nicco : Oui j'ose : En Quarantaine est largement aussi bien que [Rec]. Pour une simple raison, au-delà de la réparation du schisme engendré par le rewind : j'ai eu peur ! Bien qu'ayant vu l'original il n'y a pas un an. Certes, et Zug le dit très bien, la mise en scène de Plaza et Balaguero était plus profonde, même si pour ma part je considère que le concept même d'un ride comme [Rec] ne doit pas mettre sa cohérence interne (et donc sa tension) en défaut pour mieux élaborer une quelconque réflexion sur le medium utilisé. Si cette réflexion ne naît pas sans que les auteurs n'éprouvent le besoin de rompre leurs propres règles, c'est qu'il y a des clés mal définies dès le départ. Dans la version US, on fait fi de tout ça et on ne recherche qu'une chose : l'efficacité. A un rewind réflexif dans la version espagnole succèdent la facilité de la caméra posée au sol et cadrant par miracle l'action chez Dowdle. Dans les deux cas, l'artifice sort le spectateur du film, bien que leur but soit précisément de nous y contenir. A qualité et défaut égal, mais à intentions quelque peu différentes (pas fondamentales selon moi pour le genre présent), et respectant toutefois grandement l'original (dans mon top 10 de 2008, ne l'oublions pas), j'avoue avoir un faible pour la version US car Jennifer Carpenter pète littéralement les plombs sur la fin et joue l'hystérie comme rarement hystérie aura été jouée.

D'Artomuffix : J'ai réussi à sursauter plusieurs fois alors que je connaissais déjà l'histoire. Ce qui ne m'était pas du tout arrivé devant [Rec], trop occupé que j'étais à gueuler sur la journaliste super horripilante, et au moins aussi mauvaise que ses collègues, de sorte que tout m'a semblé arriver à trois kilomètres avec des gyrophares. L'effet pompier sans doute. Mais bon voilà, nonobstant, moi aussi je préfère les plats de grand-maman, parce que faire un remake d'un film sorti si récemment, juste pour changer le pays et la langue et lisser le tout, et ben franchement ça craint du boudin quoi.


BAD BIOLOGY de Frank Henenlotter

Vendetta : Pas vu non plus, ce qui est un de mes plus gros regrets du festival, d'ailleurs. Car au vu des réactions unanimement enthousiastes des spectateurs ayant fait le déplacement, Bad Biology semble être une petite perle enterrant sans difficulté une bonne partie de ce qui était présenté en compétition officielle.

nicco : Mais trop lol ! Voilà ce que c'est de mal lire le catalogue. Lorsque j'appris qu'il s'agissait de la nouvelle folie de Henenlotter, il était déjà trop tard... Donc vin chaud.

Zug : En lieu et place, ce fut pour nous un bon petit repas entre amis. Au menu, bières, chips, saucisson, escalopes de porc marinées sauce mexicaine et pommes rissolées. Diététique, léger et équilibré, tels étaient les principes qui nous ont guidés tout le long du festival.

nicco : Munster.

Bad Biology
Bad Biology de Frank Henenlotter



MUTANTS de David Morley

Vendetta : Aaaaaaaah, le renouveau du film de genre français. LE film qui va servir de pierre angulaire à la construction de la cathédrale de l'horreur de la Frâââââance. Ou pas. Présenté par toute l'équipe du film après un repas agité à la brasserie du Grizzli où nicco et D'Artomuffix dégustaient une fondue undercover, Mutants était dans le collimateur d'une grande partie de la presse. Et ce ne sont pas déclarations survoltées du réalisateur, David Morley ("En fait, ouais, on peut le dire : on est quand même bien frustré de ne pas avoir été repris dans la sélection officielle !") qui calment le jeu, bien au contraire. Et puis le film commence. Et là, c'est le drame. Une des rares unanimités dans les avis des rédacteurs de L'ouvreuse, d'ailleurs. Je vous la fais brève : Mutants, c'est mauvais. Mais vraiment. Mal joué (sauf, et c'est suffisamment remarquable pour être souligné, par une Hélène de Fougerolles visiblement concernée par le sujet, ce qui est tout à son honneur), très (mais alors là, très) mal réalisé (la shaky-cam utilisée systématiquement... au secours), mal scénarisé, mal... Ouais, c'est le mot : mal. Mutants, ça fait mal. Et surtout, ça arrive 28 films trop tard.
Bref, au lieu de s'enthousiasmer comme certains ne manqueront pas de le faire devant ce truc informe fait sans rigueur ni talent, tablons sur un vrai bon film de genre français qui arrivera tout de même bien un jour. Quoique, quand on voit la direction prise par certains courts-métrages cette année (Redrum, Persona Non Grata et Paris By Night Of The Living Dead), c'est loin d'être gagné. Houla, non.

Zug : Personnages indigents, lieu d’action peu mis en valeur, séquences d’action illisibles… Pas grand-chose à sauver si ce n’est les effets de maquillage et Hélène de Fougerolles. Difficile de supporter et défendre un tel film quand bien même c’est un film de genreuh français. D’autres s’en chargeront pour nous…

Macfly : Un film de zombies dans les montagnes, l'idée était marrante. Mais voilà, Mutants est un "film de genre français qu'il faut défendre parce que sinon y'en aura plus", donc comme d'habitude, c'est complètement à côté de la plaque. Acteurs minables (excepté Hélène de Fougerolles, qui semble être la seule à y croire), dialogues en mousse, personnages secondaires à mourir de rire, scénario mou du genou, caméra tremblotante victime de la mode, scènes bâclées... Mutants n'a rien pour lui, et ne mérite absolument pas d'être défendu, quoiqu'en disent ses auteurs.

nicco : J'ai du mal à comprendre la réflexion "peu de moyens = on secoue la caméra avec obturateur ouvert à fond pour que le spectateur ait mal à la tête et ne puisse pas voir ce qui se passe". Composer des cadres percutants et les dynamiser au montage, ça n'a pas été l'essence même de la série B pendant des décennies ? J'veux dire, il faut avoir les moyens de sa modernité. Sinon, back to basics.

D'Artomuffix : Julie Lescault est perdue dans la montagne avec l'instit, appelle le 12 pour avoir du renfort parce qu'il n'y a plus de café, mais là patatras, y a Navaro qui déboule avec Sabine Paturel et Smaïn pour pécho les clefs du Traffic. En plus des fois y a l'équipe de France de Rugby 1993 qui essaie de mordre des gens. On sent bien que Godard commence à en avoir mare de se peler le cul dans la neige avec sa caméra et ses moufles. Mais heureusement tout est bien qui finit bien quand Philippe de Dieuleveut arrive en hélicoptère avec Joséphine Ange Gardien à la fenêtre armée d'un Famas.

LA VÉRITÉ SORT DE LA BOUCHE DU PUBLIC
- Tiens, il sort quand Mutants ?
- Parce qu'il sort ?!


HUSH de Mark Tonderai

Vendetta : Pas vu. J'ai préféré me retaper Morse. Pas l'animal, le film.

nicco : Pas vu non plus, j'ai préféré me taper Morse, l'inspecteur.

Zug : LA très bonne surprise du festival. Pas vraiment de lien avec le fantastique si ce n’est le chauffeur routier filmé comme un boogeyman (démarche lente, sa capuche laisse son visage constamment dans l’ombre) mais un incroyable suspense qui ira toujours crescendo par la force de clichés habilement détournés.

Macfly : Bonne petite surprise que ce tout petit thriller de rien du tout tourné en numérique. Sorte de croisement entre Hitcher, Duel et Collateral, Hush est crédible de bout en bout, possède des rebondissement originaux et de très bonnes idées de mise en scène (le final dans le "camion" , la scène du téléphone où le son arrive en avance sur l'image pour installer un climat perturbant.) Ce n'est pas un chef-d'oeuvre, mais c'est carré, efficace et parfois surprenant.


DES OUVREUSES, DES ESQUIMAUX, ON APPRÉCIE L'EFFORT
L'ouvreuse, les ouvreuses, et des esquimaux
De gauche à droite : Macfly, un esquimau, nicco, une ouvreuse, la tête de Zug, Vendetta, une ouvreuse.


LES COURTS-MÉTRAGES
Petit deviendra grand. Ou restera petit. On aimerait même que certains rapetissent. C'est la section de la jeune garde du fantastique, l'armée de réserve du genre. Après projection on espère qu'une chose : que personne ne nous déclare la guerre.

PERSONA NON GRATA de Jean-Baptiste Herment

Vendetta : Le long, looooong, si loooooooooooong From Inside évoluant dans une autre dimension, une dimension où la nullité fait office d'apesanteur, il m'est hélas impossible d'affirmer que Persona Non Grata est le plus mauvais morceau d'images sur pellicule qu'il m'ait été donné de subir au cours de ce festival. Et pourtant, je vous prie de croire que ce court avait des arguments en béton : des acteurs exécrables, une réalisation je-m'enfoutiste, une accumulation ahurissante de clichés tirés des plus lamentables slashers, des effets spéciaux dont l'amateurisme fait tout simplement pitié (je ne me suis pas encore remis des mains de la victime censées être clouées à la chaise avec des clous visiblement situés à environ cinq centimètres des mains en question)... Et réussir à caser tout ça en moins de dix minutes, quelque part, ça force une certaine forme de respect. On est clairement dans la cour des grands, là.
La bobine du film présentait fièrement un sticker "Will direct a slasher movie for food". Mention spéciale pour le scénario quand même ; courage, le Goncourt n'est plus loin !

nicco : Une demo reel basique de fanboy comme on trouve environ 14870 sur Youtube.

D'Artomuffix : Errare humanum est.

Macfly : Bande démo sans aucun intérêt sinon celui d'attirer des investisseurs désireux de monter un slasher moisi à pas cher, Persona Non Grata est d'une platitude à peine croyable. Pas d'histoire, pas d'acteurs, pas de mise en scène, on nage en plein néant filmique.


DIX de Bif

D'Artomuffix : De chute. C'est vraiment pas mal mais à chaque fois que je vois un truc pareil je pense au concours Imagina et je rigole.

Vendetta : Clairement un film de techniciens, Dix bénéficie d'une idée originale ainsi que d'un traitement à l'avenant. Chose assez rare pour être appréciée à sa juste valeur, le côté gore de la chose est ici parfaitement assumé et, mieux encore, justifié. Pas totalement abouti, ce court assez... court retient cependant l'attention. Une chose est sûre : le collectif BIF, à l'origine du projet, devra être surveillé de près dans un proche avenir.

nicco : Le court qui sort du lot, racontant une histoire, proposant une identité visuelle personnelle et des idées. Etant donné que c'est le seul à avoir été pensé en tant que film, logique qu'il remporte la compétition.

Macfly : Basé sur une idée simple et inédite, Dix la joue "design à mort", avec sa photo bleutée et ses SFX plutôt réussis. C'est branché, c'est djeun's, mais ça ne casse pas des briques. Enfin on va pas faire la fine bouche, parce que ça reste quand même un des meilleurs courts de la sélection.


PARIS BY NIGHT OF THE LIVING DEAD de Grégory Morin

Vendetta : Follement encouragé par son fan-club (les spectateurs trop contents d'avoir été mal grimés en zombies, même que hé-regarde-on-me-voit-un-quart-de-seconde-en-train-de-tituber-juste-derrière-le-héros-c'est-vraiment-trop-cool-tavu), Paris By Night... est l'exemple type de films de potaches qui fait rire uniquement ceux qui y ont participé. Très moche, remplis de coups de coudes au spectateur tombant hélas tous à plat et, comme de bien entendu, abominablement mal réalisé... Inutile d'en rajouter. Mais bon, apparemment, le public cible de Paris By Night... c'est le geek. Normal que je n'aie pas aimé, dans ce cas.

nicco : Le titre tient lieu de scénario, les effets spéciaux de mise en scène et les poses ridicules de direction d'acteurs ("Vas-y chérie, tourne-toi et tire sur le zombie avec le bras tordu dans le dos en te faisant un torticolis, c'est plus pratique pour viser, mais si, c'est du genre"). L'exemple du film Playmobil pour gamins du XXIème siècle, la caméra remplaçant les bonhommes en plastique sans que cela influe sur l'élaboration du terrain de jeu. Il y a une si évidente absence de volonté de cinéma qu'on ne peut décemment pas encourager ce genre de projets, et se poser des questions sur les raisons de leur succès. 

D'Artomuffix : Aidez ce réalisateur à aller faire des pubs pour des pantalons en Inde. 

Macfly : A l'instar de Mutants, Paris By Night... est encore une tentative ratée de film de genre français. A croire que le simple fait d'officier dans ce domaine permette aux réalisateurs de ne pas construire une histoire qui tienne la route et de combler avec un enchaînement de clins d'oeils référencielo-pseudo-fédérateurs pour s'octroyer l'adhésion du public. Seule idée potache un peu sympa : la destruction des symboles patriotiques français (Zidane, la tour Eiffel...) 


TONY ZOREIL de Valentin Potier

Vendetta : Un réel scénario + une réalisation qui assure + humour = bingo. C'est pourtant pas compliqué, bon dieu !

nicco : Prototype du court bâti sur le patron générique des bandes pour festivals. Ni bon ni mauvais, fait son office, satisfait ceux qui le subventionnent, fournit une carte de visite proprette à son auteur, aide le public à se rappeler pendant cinq minutes que la différence c'est bien mais tout de même faut pas se mélanger, s'oublie dans la demi-heure.

D'Artomuffix : Rastafarai Zion Babylon System Praise Jah children king of the universe Bumbaklat Peace Célacié Aye.

Macfly : Un court-métrage niais sur "la différence" filmé comme une pub pour assurances, ça vous dit ? Moi je passe mon tour.


REDRUM de Florent Schmidt

Vendetta : Sara Forestier et Audrey Marnay. Voilà.

nicco : Je n'ai compris ni le titre (probablement une fine référence à un film trop peu souvent cité), ni le sujet (deux filles entrent discrètement chez un mec pour lui toucher la bite, ce qui déplaît à ce dernier), ni l'intention du projet.

Macfly : L'histoire est inepte, la réal inexistante, la photo laide à pleurer. Oui mais voilà, il y a deux "stars" donc on le diffuse en festival. En conséquence, une petite pensée pour tous les courts bien foutus refusés à la sélection parce que dépourvus de noms reluisants au générique. Merci pour eux.

D'Artomuffix : Edrem al ed.


NEXT FLOOR de Denis Villeneuve

Vendetta : Servi par des effets spéciaux réellement impressionnants (dépassant même en qualité ceux qu'on a pu voir dans certains longs en compétition), Next Floor est le seul court non-français de la sélection. Et au vu non seulement de la qualité de ce court mais également de celle des autres sélectionnés, on aurait vraiment mieux fait d'aller davantage pêcher à l'étranger.

nicco : Une sympathique métaphore joliment mise en image, teintée d'influences plutôt bien digérées, démontrant une maîtrise du rythme et du cadrage sans pour autant essayer de péter plus haut que son cul. L'antithèse d'un produit comme Paris By Night Of The Living Dead en somme.

Macfly : Meilleur court de la sélection, Next Floor la joue plus fine, puisqu'il n'essaie pas de raconter une histoire, mais plutôt de dresser tableau abstrait. La puissance visuelle de certaines images sert donc pleinement la métaphore (un peu lourde, malheureusement) du film.

D'Artomuffix : Hmmmm manger de la viande…


LE PALMARÈS

Prix du meilleur inédit vidéo : Timecrimes de Nacho Vigalondo

Prix du court-métrage : Dix de Bif

Prix du jury Sci-Fi : The Midnight Meat Train de Ryuhei Kitamura

Prix du public : The Midnight Meat Train de Ryuhei Kitamura

Prix du jury jeune : Sauna de Antti Jussi Annila

Prix de la critique : Morse de Tomas Alfredson

Prix du jury : Grace de Paul Solet

Grand Prix : Morse de Tomas Alfredson


Voilà, on a fini par retrouver Charlie, il était en Suède, tranquille, entrain de pondre le Grand Prix de cette édition 2009 de Fantastic'Arts.
Pour le reste, à part les deux surprises que sont Sauna et surtout Grace (qui font plaisir, quoi qu'en pense d'eux), peu d'extravagances. TMMT récolte les deux babioles qu'il était venu chercher, voilà, c'est fait, super, Dix confirme son statut de bête de concours et Morse s'apprête à mettre des claques à tout le monde.


LE NOMBRE : 24
La quantité d'esquimaux avalés par nicco en quatre jours.
"C'était gratuit !" - nicco


CLOVERFIELD VS. FROZEN RIVER


D'Artomuffix tente de nous prouver qu'il est le fils caché de James Brown quand un gros craquement sourd provient de la couche de glace qui nous sépare du lac. Admirez le sang froid.
L'an prochain en compétition court-métrage.


LA NUIT DE L'EFFROI QUI VIENT DU FROID
Un vent venu du nord soufflait sur Gérardmer cette année. Pas moins de trois films scandinaves en compétition officielle ! Et comme si cela ne suffisait pas, une nuit spéciale en remettait une couche avec deux slashers norvégiens et un film suédois. Débutant à minuit, seul deux membres de L'ouvreuse ont trouvé le courage de se farcir deux tiers de la triple séance proposée à des spectateurs n'ayant pas froid aux yeux.


COLD PREY de Roar Uthaug

Vendetta : Je ne l'ai pas vu. Mais j'ai bien aimé leur dernier album.

D'Artomuffix : Bon ben voilà un bon petit slasher des familles bien comme il faut, certes légèrement prévisible à certains moment mais assez cohérent et joli. J'ai envie de manger des boites de conserve.

nicco : Personnellement, je considère qu'un slasher est bon si les perso sont bons, parce qu'il n'y a rien de plus banal et répétitif qu'un objet contondant s'enfonçant dans un bladder de faux sang. Les personnages de Cold Prey sont intelligents, logiques, sympa, humains, crédibles. Bons, quoi. Donc Cold Prey est bon.


COLD PREY 2 de Mats Stenberg

nicco : Personnellement, je considère qu'une suite de slasher est bonne si elle met en place une mythologie propre au tueur et exploite les pistes balancées dans le premier épisode. C'est bête, Cold Prey 2 n'arrive jamais à en révéler plus que le final du film de Uthaug. Malgré une ripleyrisation de l'héroïne, Cold Prey 2 est donc juste moyen.

Il y avait un troisième film, The Unknow, de Michel Hjorth. Mais à 4h00 du mat' nous préférâmes juger plus sérieux d'aller mettre du munster dans le lit de Macfly.


TSSS, MAIS ON SAVAIT QUE LA GLACE TIENDRAIT
Nous.

Remerciements à Public Système Cinéma et à toute l'équipe du festival ! (surtout les ouvreuses)




   

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