Monsters

Calamar adentro

Affiche Monsters

Vous connaissez l'histoire de la jeune fille en détresse qu'un bel aventurier vient dépêtrer du fin fond de la jungle / forêt / mouise pour la remettre dans les bras du riche papa ?


Bêcheuse, elle insupporte son guide. Le bougre en a vu d'autre évidemment, et rechigne à causer avec son colis quand bien même il louche sur son boule. Puis, les aléas du road trip feront que finalement cette conne superficielle n'est pas si conne, que ce grand dadais qui se la joue est touchant dans cette détresse personnelle qu'il fuit en se frottant au danger. Les familles restées à demeure sont destinées à être cocufiées à mesure que les kilomètres déroulent. Et, forcément, paumée dans la nature hostile, la fille de la ville apprendra auprès des autochtones que leur vie n'est pas simple, que chacun à ses soucis et que les siens, bah sont pas si graves, hé.

Monsters
 

C'est ce récit pas très neuf que nous propose Gareth Edwards dans ce premier long-métrage qui agite le Web depuis que les tags District 9 et Cloverfield y furent accolés, à tort. On comprend en effet très vite que ce Monsters s'intéressera bien plus aux humains qu'aux extra-terrestres (les crevettes laissent place à des calamars), et s'il faut le rapprocher de Cloverfield, c'est davantage pour ses personnages tête à claque aux réactions illogiques qu'autre chose, tant les budgets, les intentions et les procédés de mise en scène n'ont strictement rien à voir. A priori, ce n'est pas une mauvaise surprise. Sauf lorsqu'on prend conscience, le film progressant, que les deux personnages principaux à qui la caméra va coller 90 minutes durant ne dépasseront jamais leur statut de coquille fonctionnelle : rien ne nous est épargné, des poncifs énoncés plus haut jusqu'au fiancé pas vraiment désiré, la niña ramenée au pieu un soir de beuverie déclenchant la marche de la jalousie, la bague de fiançailles sacrifiée, et on passe sur le parallèle téléphonique final à la station service (Nora Ephron s'est mise à la SF ?).
Surtout,
Monsters construit un grand sentiment de déception scènes après scène : tout ce décorum de science-fiction pesamment mis en place ne sert qu'à proposer un discours balourd digne de Roland Emmerich un soir de repas arrosé. Il faut voir ces deux nigauds paumés en plein milieu d'une zone contaminée envahie par des troupeaux de tentacules géants, deviser au couchant sur ce que ça fait de se sentir étranger à une nation, le luc posé sur un vestige aztèque, contemplant le mur séparant les USA du Mexique. Spectateur, si tu n'as pas compris ici l'allégorie, tu ne comprendras rien.

Monsters
 

Car Monsters ne fait pas que répéter un schéma vieillot, il prend place dans une zone tampon entre les States et le Mexique où se développe depuis maintenant six ans et le crash d'une capsule de la NASA remplie d'échantillons un éco-système extra-terrestre dans sa toute jolie bioluminescence (quel dommage, à même pas un an près on aurait pu accuser James Cameron d'avoir pillé un autre petit film).
Venu du documentaire, Edwards prit le parti, plutôt intéressant sur le papier et conforme à son budget annoncé de 15 000 Dollars, du traitement naturaliste, filmant ses acteurs au long cours. C'est ce qui livre au métrage ses meilleurs moments (la soirée avant le départ, le train), imprégnant une ambiance que l'on retrouve assez rarement dans le genre, et ce n'est peut-être pas un hasard si ces séquences sont les plus déconnectées du récit. Limité dans son budget (et son inspiration ?), Edwards peine à renouveler les idées structurant son histoire, et se repose toujours sur les mêmes effets d'annonce. On ne compte pas les plans sur les cartes et pancartes mettant en garde contre la fameuse zone contaminée ou les dangers aliens. Enfin si, on les compte : près d'une dizaine, soit un toutes les neuf minutes en moyenne. Mais une règle intime au chroniqueur de reprocher à un scénario la répétition des informations toutes les dix minutes seulement s'il est produit pour plus de quarante millions de Dollars. En deçà, le spectateur peut être pris pour un poisson rouge.

Il en va de même pour les infos télé. Chaque arrivée dans un lieu n'échappe pas au plan sur un poste diffusant les images noires et vertes des combats contre les envahisseurs. Loin de faire monter la tension, ces redondances informatives ne font que la diluer tant elles donnent le sentiment que les habitants ne vivent l'occupation qu'à travers leur tube cathodique (et quand les monstres sont enfin source de danger direct, ils seront… [spoiler !] attirés par la télé [fin spoiler]). Le personnage principal peut s'échiner à prendre la population en photo, quasiment rien ne témoigne d'un changement dans leur quotidien (enfin si, des pancartes…).


La multiplication des plans shootés à l'arrache sur lesquels le cinéaste incruste avions et hélico en début de récit martelant l'état de guerre n'augurait tout de même pas un traitement si poussif. Dommage, vraiment, tant
Monsters pouvait très bien prétendre au statut de petit classique malin fait pour deux francs au même titre qu'un Primer ou un Cube. 
Bien calé entre
District 9 et Battle Los Angeles, Monsters confirme toutefois le renouveau de l'alien belliqueux au cinéma. Il confirme également que la diversité des formes n'est pas synonyme pour autant d'originalité.

4/10
MONSTERS

Réalisateur : Gareth Edwards
Scénario : Gareth Edwards
Production : Allan Niblo, James Richardson
Photo : Gareth Edwards
Montage : Colin Goudie
Bande originale : Jon Hopkins
Origine : Grande-Bretagne
Durée : 1h34
Sortie française : 1er décembre 2010




   

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