Les archives McTiernan - Predator

Shane vert

Affiche Predator

Mais qu’est-ce qui a pris à Joel Silver d’aller dépêcher un jeune cinéaste dont le premier film, certes intriguant, était loin de remplir le cahier des charges de l’action made in eighties ? Et tout ça pour filmer un mix de Commando et d’Alien dans la jungle ?!


Ça s’appelle le flair, ou une putain d’intuition quant aux capacités de John McTiernan. Ayant déjà démontré une certaine aisance formelle avec Nomads, McT affine sa classe visuelle pour les besoins d’un film de gros bourrins. Et débute son périple au sein du film de genre, et d’action plus particulièrement, qu’il s’amusera à réinventer au gré de se différentes expérimentations. Mais le tournage de Predator, tout comme celui de Piège De Cristal, est loin d’être une partie de plaisir.

Voici ce qu’il en dit au cours de la mythique interview fleuve du n°577 des Cahiers Du Cinéma :
"Le terrain me semblait suffisamment balisé, je n’avais qu’à me comporter comme un brave garçon, mener le projet à terme en restant dans le rang, et surtout, garder la tête au-dessous du champ des radars de la politique, omniprésente ici à Hollywood. La plupart des films qui sont détruits le sont pour des raisons politiques. Sur ce coup-là, il y a eu malgré tout quelques batailles. Le scénario de départ n’était pas bon. Je l’ai d’abord réécrit entièrement. Mais personne ne lisait ma version ! Alors j’ai commencé à tourner le scénario dans son état initial, en y apportant de légères modifications. Aux deux tiers du tournage, j’avais acquis une crédibilité suffisante pour procéder à de plus amples changements. Tout ce que j’ai enlevé du script original parce que c’était mauvais, a été gardé pour la suite, Predator 2… Cela tournait principalement autour du vaisseau spatial du prédateur. C’était une erreur de le montrer, je considérais que toute imagination, tout fantasme seraient interdits, tués par la visualisation du vaisseau. Cela m’a pris plusieurs mois de négociations pour réussir à ne pas le filmer."
A peine au cœur du système et déjà emmerdé par les tractations incessantes. Là aussi, un loooong périple débute pour lui.

Predator
 

Après un premier essai aux apparentes velléités auteurisantes, McTiernan se retrouve aux commandes d’un pop-corn movie. Contre son gré car c’est le seul moyen de percer à l’époque ? Pas vraiment, comme le rapporte les propos mis en forme par Marc Toullec dans la preview du film dans le n°48 de Mad Movies :
"J’ai toujours rêvé de réaliser un spectacle du samedi après-midi, un spectacle un peu à l’ancienne, et Predator était tout désigné pour être le film d’action dans le style que j’aimais, avec un suspense aussi. Il combine des éléments qu’on n'a pas l’habitude de trouver mêlés, l’histoire classique d’un héros d’abord et ensuite celle d’un film d’horreur, un peu comme les légendes nordiques dans lesquelles les guerriers luttaient contre des êtres surnaturels. Le scénario de Predator me rappelait également les vieux films de guerre et les comics-books remplis d’hommes plus grands que nature. Arnold Schwarzenegger est l’une des rares personnes au monde à pouvoir incarner une de ces figures."

Outre sa créature depuis devenue mythique, ce qui caractérise le film est la multiplication des très gros bras des acteurs. Et dans le genre, ceux de Schwarzy et Carl Weathers se posent là.
Toujours dans le numéro de Mad Movies : "Il y a assez peu d’acteurs qui peuvent servir de contrepoint à Schwarzenegger. Je recherchais quelqu’un de très fort, quelqu’un qui soit à la fois un bon comédien et possède une réelle présence physique. Si vous jetez un coup d’œil sur la liste des gens réunissant ces conditions, vous verrez que très peu retiennent l’attention. Carl Weathers ressortait et nous avons été très heureux de l’avoir à nos côtés."

Predator
 

Comme toujours dans la filmographie de McT, la force brute ne suffit pas. Il faut pouvoir l’utiliser à bon escient et en bonne intelligence. Et donc imposer à sa bande d’acteurs de s‘aguerrir au contact d’un authentique baroudeur.
"Nous avons amené sur place des entraîneurs spéciaux avec à leur tête le conseiller technique Gary Goldman, un type incroyable. Arnold, Jesse Ventura, Richard Chaves et Sonny Landham avaient des connaissances militaires, j’ai voulu leur donner une chance d’apprendre à se connaître, de développer un sens de la solidarité. L’idée était d’endurer quelque chose et de la vaincre ensemble. Peut être que le meilleur représentant de cette transformation a été Shane Black. C’est un bon scénariste mais il passait beaucoup de son temps devant une machine à écrire, une cigarette à la bouche dans un sombre appartement d’Hollywood. Au bout de quatre ou cinq jours, même Shane commençait à avoir l’air d’un tueur !"

En tout cas, il n’y a pas que les comédiens qui ont physiquement morflé sur le tournage. Maîtriser et résister à l’environnement furent une véritable gageure pour le réalisateur.
"Il a fallu qu’on s’adapte au terme d’efforts énormes, ne serait-ce que pour pouvoir y travailler, s’asseoir, rester debout, ou installer une caméra sur son trépied ou le travelling sur ses rails alors que la topographie n’était pas idéale. J’étais contraint de me déplacer avec un poignet fracturé. Je me suis ainsi blessé en grimpant sur un arbre pour y trouver une position à la caméra. La branche sur laquelle je m’étais installé s’est cassée et m’est tombée sur la tête !"




   

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