Sicko rend malades les néoconservateurs
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- Instant critique par Johan Torquel le 6 septembre 2007
Sicko bitches party
Incroyable ! Le dernier Michael Moore conspué de toutes parts. Alors que la presse chantait les louanges du fils de prolo depuis Bowling For Colombine, l'anti-américain a subi le feu nourri de la critique pour son dernier film, Sicko.
Que s'est il passé pour que le héros des temps modernes qui avait presque sa statue au Kremlin se transforme en affreux propagandiste de la Nomenklatura ? Les méthodes que la presse encensait pour Farenheit 9/11 sont soudainement devenues complètement amorales dans Sicko.
D'où vient ce nouvel amour pour la rigueur méthodologique ? Cela n'avait dérangé personne lorsque Moore faisait de l'Irak un véritable Eden. La presse était ravie "qu'il utilise les mêmes méthodes que ses ennemis pour les combattre", tous les coups étaient permis avec ce salopard de Bush ! On a pu constater après coup l'efficacité de la méthode : la réélection sans appel de W.
Mais pourquoi, soudainement, lorsque Michael Moore affirme que le système de santé Français est bien plus juste que l'Américain, le propos tend à être douteux ? Pourquoi devient-il "le Che Guevarra des lecteurs de Télérama" (dixit Score) ?
Toute la presse se scandalise. Michael Moore nous montre "un couple français moyen" gagnant 7000 euros mensuel. Hérésie ! Le prolétaire deviendrait-il un bourgeois (pour reprendre la dichotomie marxiste chère à une certaine presse) ? Il l'a pourtant râbaché dans chacune de ses interviews : il a voulu comparer la situation d'un couple moyen américain (effectivement à 7000 dollars mensuel) avec son équivalent Français. Ce n'est pas dur à comprendre, c'est peut-être le seul point clair du film (bien plus douteuse est son excursion chez Castro). Mais la presse, les spectateurs, les journalistes du petit écran, TOUS se focalisent hystériquement sur ce point. Ciné Live va même jusqu'à affirmer que le système de santé Français n'est pas mieux que celui des U.S.A !
Ce phénomène de timidité soudaine est très intéressant, surtout quand on constate corollairement que la France se néoconservatise et que notre gouvernement essaye tant bien que mal de nous convaincre des vertus de la privatisation de la santé.
L'occasion était trop belle pour nos médias de montrer leur obédience. On utilise cette très lâche et très pratique méthode hypercritique : Michael Moore s'est trompé sur un point, "le système de santé français gratuit", alors l'ensemble de son propos est faux !Â
Quelques mots sur le film tout de même (qui ne les mérite pas) : Moore botte en touche comme d'habitude. Niveau artistique, c'est toujours très pauvre, avec une mélodramatisation manichéenne outrancière. Niveau propos, ça ne va pas non plus péter très loin. A l'heure où le vrai problème de l'Amérique est sa politique extérieure, Moore se concentre sur la politique intérieure. Les carences du système de santé Américain ne sont pas nouvelles, et ont déjà été traitées sous tous les angles. Mais bon, voyons le bon côté, le film aura au moins le mérite de découvrir les pulsions néoconservatrices de la presse gauchiste (et non de gauche).
La même semaine, Télérama publie une interview du président de l'université de Jussieu dans laquelle ce dernier affirme, sans aucune justification préalable, que la hausse des frais de scolarité serait en fait favorable aux couches populaires. Faire payer ces salauds de pauvres plus cher éviterait qu'ils ne branlent rien à la fac ! Raquer 2000 euros l'année provoquerait un miraculeux déclic motivationnel. Vous ne rêvez pas, c'était bien dans un journal de gauche.
Un peu désorienté, le lecteur attend tout de même un élément du réel pour pouvoir adhérer à cette assertion psycho-sociologique de comptoir. Ouf, à la ligne suivante, il annonce ses chiffres : seulement 10 à 12% des étudiants de Jussieu viennent des couches populaires. Voici la preuve irréfutable qu'on attendait, voilà pourquoi les frais de scolarités doivent augmenter, voilà pourquoi nous devons bloquer l'accès des banlieusards à son université...
Ce que le saint homme oublie de dire, c'est que son administration recale quasi-systématiquement les étudiants venant de banlieue pour privilégier les étudiants de Paris intra-muros. Il dénonce donc un phénomène qu'il provoque... Quelle éthique !
Vous vous demandez de quel côté la France va se faire secouer par les plaques tectoniques atlantistes anglo-saxonnes ? Ce n'est pas nécessairement à droite qu'il faut regarder. Cette presse - gauchiste - va utiliser tous les procédés imaginables pour bien huiler nos esprits en abusant de son statut pour rendre les valeurs dominantes à l'Elysée socialement acceptables.
Mais parce qu'un dessin vaut mieux qu'un long discours, voici un extrait de la critique des Inrocks :
 "Une fois de plus, Michael Moore se moque bien de la vérité. Mais il y a au moins trois choses qu'on ne pourra pas lui reprocher : il a de bonnes idées (...); il est souvent drôle (...); et surtout, il a ceci de commun avec les criminels et les artistes (...) qu'il ne supporte pas que le monde soit tel qu'il est."
Réfléchir sur le monde n'est plus seulement ringard, mais criminel. Vive les Plasticines !