Mars 2008

Enjoy the silence

Marion Cotillard

"Le propos de Marion Cotillard est significatif d'une forme de dérive qui affecte les rangs de la gauche depuis quelques années." Contrairement à ce qu'on pourrait croire, non, la rédaction de Marianne ne reproche pas à la récente oscarisée d'avoir élevé Olivier Dahan au rang de "génie" devant toute la planète dimanche dernier.


La clique de Kahn désapprouve seulement, au sein d'un article à charge, qu'une actrice puisse se poser des questions, remettre en cause les informations qui lui parviennent, se faire sa propre opinion à partir d'observations.
Il n'en faut pas plus pour passer en mode fouille-merde afin de découvrir des secrets honteux dans le passé de la star (car la réussite c'est louche, faut salir) et transformer en ode négationniste quelques remarques empreintes des doutes propres à tous ceux qui remettent en question ce qu'on leur donne à percevoir, et ainsi faire de Cotillard une paranoïaque chronique, une conspirationniste (ce qui est mal, car bien sûr aucune décision n'est jamais prise en secret par des dirigeants : ja-mais) et finalement le symbole de la "dérive qui affecte les rangs de la gauche depuis quelques années". On voudrait ordonner à ses lecteurs de ne pas oser la réflexion personnelle ni avancer des variations dans les discours officiels, on ne s'y prendrait pas autrement. Et à la lecture de la réponse de Marianne aux détracteurs de cet article, on se dit que la calomnie a de beaux jours devant elle.

Tant qu'on en est à parler de dérive de la gauche, parlons de Cali. Ce dernier n'est d'ailleurs même plus une dérive mais un échouage : l'artiste de gauche insulte sans gêne les téléchargeurs en les traitant de "voleurs" à une heure de grande écoute sur une chaîne publique, vilipende les couches populaires qui économisent une quarantaine d'euros par mois en téléchargeant de la musique. Mais qu'espérer d'un chanteur qui déclare sans sourciller que lorsqu'on n'aime pas, on ne discute pas, que l'on doit donner son avis seulement s'il flatte l'égo ? La diversité des points de vue va indéniablement mieux se porter avec de tels défenseurs de la culture.

Culture qui n'a d'ailleurs pas besoin de ce subversif en plastique pour se défendre. La Fnac, dont le président vient de décider que les juges ne servent pas à grand-chose et dont on peut allègrement s'en passer pour traquer les terroristes qui empêchent Cali de partir en Nouvelle-Calédonie, la Fnac donc, a de très bons défenseurs : tel Guy Messina, directeur du disque et de la vidéo pour la société agitatrice de curiosités, mis en cause dans une affaire de… piratage ! Ben oui mais ce n'est pas leur faute, voyons : "Nous achetons 262.000 références par an et nous avons plus de 600 fournisseurs. Ils savent ce qu'ils nous vendent, ils sont responsables. C'est à eux d'être honnêtes. On ne va pas, à chaque commande, demander au fournisseur qu'il nous prouve que son produit possède toutes les autorisations. Maintenant, si quelqu'un nous prouve qu'il n'est pas légal, on le retire des rayon" explique Mr Messina. Le pauvre chou.

Comme le souligne l'article de Numerama d'où est tirée cette citation, c'est exactement le même argument avancé, en vain, par les fournisseurs d'accès, les  responsables de sites Web et les développeurs de logiciels P2P.

Ne questionnons plus : c'est négationniste. Ne défendons pas le point de vue du peuple : les artistes engagés s'en chargent pour vous et pour leur porte-monnaie. Ne fraudons pas : les professionnels donnent l'exemple. Taisons-nous, ce sera plus simple.




   

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RoboCom.

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