The Walking Dead - Saison 7
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- Série TV par Nicolas Zugasti le 4 janvier 2017
La stratégie du choc
Avec l’introduction en fin de saison 6 de Negan, le super bad guy ultime, la production annonçait le renouveau d’une série au rythme neurasthénique malgré quelques fulgurances. Autrement dit, un accélérateur de particules qui allait enfin apporter du sang neuf.
Pour le coup, du sang Negan en amène et en déverse même quelques litres d’entrée de jeu histoire d’installer le personnage comme le big boss qu’il ne vaut mieux ne pas trop chatouiller. Seulement, la surenchère de violence physique et psychologique de cet épisode de reprise se borne à prodiguer une succession de chocs plus que d’instiller une quelconque panique au sein du groupe de survivants menés par Rick et encore moins parmi les téléspectateurs. Certes, les fans partagent alors la stupéfaction des personnages et sont tout aussi groggy, mais l’escalade horrifique censée semer les premières graines du désespoir et faire ressentir la tristesse des pertes encourues se résume à un étalage graphique, échouant à générer la moindre implication émotionnelle. Soit peu ou proue les limites de la série entrevues très tôt en saison 2 et qu'aucune équipe créative ne parviendra à transcender par la suite. Le principal problème étant l'évolution des personnages (historiques ou nouvellement intégrés en tant que protagonistes récurrents) qui tourne en boucle, revenant quasiment aux caractéristiques originelles qui les définissent sans que l'on sente un réel changement dans leurs choix et leur appréhension de l'univers violent auquel ils sont constamment partie prenante. Cela est même devenu caricatural avec la bande d'Abraham, entre autres, qui ne varie pas d'un iota. Moins que des archétypes, ils se bornent à leur fonction dans le récit.
Pourtant, la saison 6 semblait instituer un changement de braquet en perturbant le mode de fonctionnement des survivants via l'entrée en lice des nouvelles communautés d'Alexandria, de la Colline et les Sauveurs du mystérieux Negan. Les besoins et l'emprise de ce dernier les obligera à une expédition punitive sauvage qui scellera finalement leur destin dans le dernier épisode où l'homme mystère révèle enfin son apparence.
Une conclusion plutôt bien lancée avec sa construction paroxystique, les Sauveurs bouchant peu à peu toutes les sorties pour obliger la petite équipée à se confronter au centre du labyrinthe ainsi formé au Minotaure, Negan, mais qui oblitère presque instantanément tous ces efforts par une abondance de paroles. La concision n'a jamais été le fort de la série mais on atteint des sommets de dilution de menace dans le dernier quart d'heure où Negan n'en termine pas de signifier la fin de la domination de la bande à Rick et de jouer au chat et à la souris avec chacun des membres agenouillé attendant son sort. L'entrée en scène très théâtrale de Negan permet de lancer au mieux un personnage cabotin – renvoyant à un précédent rôle de son interprète Jeffrey Dean Morgan, le Comédien du Watchmen de Snyder – insinuant une menace inédite pour notre troupe avec une dose de fantaisie salvatrice. Las, à force de tergiversation quant au moment d'abattre sa chère Lucille, sa batte de baseball bardée de fil barbelé, sur un de nos pauvres rescapés afin de faire un exemple et soumettre la clique, en particulier Rick, Negan compromet sa nature mortifère et surtout sa crédibilité. A force de retarder l'échéance, la tension extrême voulue tend à se dissiper. Manquerait plus que l'épisode se termine avant le passage à l'acte de Negan !
Ce n'est pas le cas mais on en n'est pas passé loin. On voit effectivement le psychopathe lever sa batte mais la malheureuse victime de ses coups est masquée par un écran noir accompagnant les cris d'horreurs de ses compagnons et les propres cris de frustration des téléspectateurs pas encore anesthésiés par la lourdeur de la mise en place. On pourra gloser sur ce procédé quant à son honnêteté et sa pertinence mais on peut dire qu'on assiste enfin à une certaine prise de risque, proposant presque un cliffhanger digne de ce nom. Les hypothèses vont donc bon train durant le hiatus de plusieurs mois avant la reprise du show fin octobre, certains pariant sur la fidélité au comic book qui voyait Glenn périr, d'autres espérant un autre choix, permettant à la série de tracer son propre sillon, avec le risque de voir les scénaristes jouer la carte du chamboulement-mais-pas-trop en sacrifiant un personnage de seconde zone.
Et bien, ils ont décidé de ne pas choisir ! Comme craint, c'est un protagoniste de moindre envergure qui y passe, en la personne d'Abraham. Mais ce n'était qu'une secousse avant l'onde de choc ultime et le tabassage de Glenn. Histoire de faire monter les paris, ces morts ne seront révélées que par l'entremise de deux flashbacks de Rick intervenant à mi-épisode après avoir été mis à mal par Negan qui l'a emmené en excursion pour lui effacer définitivement son sempiternel regard de défiance.
Problème : à vouloir à tout prix reculer un peu plus la démonstration de force de Negan, cet épisode 7x01 échoue sur tous les tableaux. D'une part, le malmenage du shérif Grimes indiffère car ce que l'on attend c'est de savoir qui est trépassé, nom d'un zombie ! Dommage, car l'initiation de Rick par Negan au milieu d'un horde de zombies dans une brume aux confins oniriques possédait quelque attrait. D'autre part, le caractère sanguinaire et ultra-violent de Negan que la production a survendu entre les deux saisons a du mal à s'imposer. Plus que rechercher la montée en puissance d'un asservissement psychologique, l'effet recherché est prioritairement la succession de chocs toujours plus puissants, passant de la casse de Rick aux exécutions d'Abraham et Glenn. Le sentiment de perte de contrôle de la situation et surtout de sa destinée est ainsi largement mis en sourdine pour concerner avant tout une perte sentimentale. Le credo de l'épisode, c'est faire pleurer ses personnages et fans, et il s'y emploie sans ménager ses efforts, à coups de multiples inserts de jours plus heureux, du souvenir énamouré des chers disparus, d'une séquence finale fantasmée réunissant leur famille reconstituée et s’appesantissant sur ce qui aurait pu être et qui n'adviendra jamais... En passant par les visages déformés par la douleur de Maggie et les autres, Rick demeurant dans une non-réaction à la limite de la catatonie (état assez récurrent chez lui lorsqu'il est soumis à un choc brutal). Si après ce festival vous n'avez toujours pas versé votre petite larme...
Et si vous comptiez sur les sept épisodes suivants pour ébaucher quelques attentes, abandonnez tout espoir. Arrivé à mi-parcours de la septième saison, on constate avec effarement et une certaine amertume la transformation presque terminale d'un show qui avait pourtant plutôt bien commencé. Désormais, The Walking Dead se mue en véritable telenovela où on s'appesantit avant tout sur les réactions excessives des personnages sans prendre la peine de construire la moindre trame. La série est devenue à ce point ridicule et avare en péripéties que l'on peut à la limite se contenter de regarder un épisode sur quatre sans qu'il n'y ait de lacune insurmontable à la compréhension des maigres enjeux formalisés.
Vous l'aurez compris, c'est dorénavant du côté des dingos de Murphytown que les zombies se propagent et se développent avec bien plus d'intérêt.
THE WALKING DEAD S07E01: The Day Will Come When You Won’t Be
Réalisateur : Greg Nicotero
Scénario : Scott M.Gimple
Production : Alex Coley Brown, Ryan DeGard, John Marler
Photo : David Boyd
Montage : Dan Liu
Bande originale : Bear McCreary & Rohn Schmidt
Origine : Etats-Unis
Durée : 46 minutes
Diffusion française : 23 octobre 2016