Gérardmer 2015 : Jamie Marks Is Dead
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- Critique par Guénaël Eveno le 2 février 2015
Harry Potter et le placard hanté
Six ans après Les Ruines, Carter Smith revient avec un film monotone dépeignant les conséquences de la mort d'un lycéen sur une petite ville, Jamie Mark Is Dead, présenté en compétition à Gérardmer.
Sosie officiel d'Harry Potter, Jamie "Mooney" Marks est retrouvé mort sur la plage. Si ce meurtre émeut la communauté, sa disparition trouve peu d'écho parmi ses camarades. A l'exception d'Adam, jeune homme dont la mère (Liv Tyler) est devenue paraplégique suite à un accident qui a un rapport indirect avec la mort de Jamie. Il se rapproche très vite de Gracie, la jeune fille qui a découvert le corps, et est bientôt suivi par le défunt... Gracie lui confirme que le mort la hante aussi, mais lui conseille de rester éloigné pour continuer à vivre. Désireux d'aider Jamie Marks, Adam finit par se lier d'amitié avec le lui, jusqu'à le suivre dans ses aventures nocturnes et découvrir un monde inconnu.
Jamie Marks Is Dead s'apparente à une mélopée mélancolique dénuée de la moindre variation dans laquelle même la ballade nocturne, point d'orgue du film, paraît bien plate. Dans sa description de l'au-delà , Carter Smith refuse le merveilleux et canalise au maximum le fantastique, préférant se concentrer sur les rapports humains. Le corps des morts y alors est matérialisé à l'extrême (Jamie porte les vêtements d'Adam) et rien ne les différencie des vivants, sinon que ces derniers ne peuvent normalement pas les voir.
Dans ce contexte, la mort de Mooney Marks et le devoir d'oubli que les vivants s'efforcent de respecter pour poursuivre leur quotidien se font métaphores de l'invisibilité sociale d'un lycéen discret. C'est paradoxalement sa disparition qui a mis en avant son existence aux yeux de tous, qui a forcé Adam à se souvenir et à choisir de le rendre visible, le libérant peu à peu des secrets qui ont conduit à sa mort. Jamie Marks Is Dead n'aborde pas de front l'homosexualité, mais truffe ses dialogues et situations d'allusions explicites (le mort sort littéralement du placard d'Adam, il épie jalousement les ébats sexuels d'Adam et Gracie...), jusqu'à un final qui ne s'embarrasse plus de verser dans l'analogie fine.
Dans son désir de décrire l'oubli et l'ennui d'un quotidien sans horizon, Carter Smith a laissé derrière toute volonté de surprise et le renouvellement. Son film conte une errance dont il ne s'échappe jamais, condamnant le spectateur à quelques notes de pianos en guise de climax dramatique. On attend patiemment qu'il se passe quelque chose, mais à ce niveau de suggestion, il est tentant d'abdiquer. Â
Jamie Marks Is Dead de Carter Smith, sortie française : inconnue