The Fall

Tarsem et récolte

Affiche The Fall

Quand les loustics David Fincher et Spike Jonze prêtent leur célèbre patronyme pour aider le second métrage de Tarsem, leur pote de Propaganda Films - la boîte qui offrit parmi les plus beaux clips des années 80 et 90, on stoppe tout, et on se précipite en salle.


Ha mais non, sot que je suis, ce petit bijou, puisque c'en est un, n'est apparemment digne que d'une pauvre sortie directe en DVD au milieu de l'été, et ce trois ans après sa production. Encore et toujours les mystères fumeux de la distribution…
Et c'est franchement idiot, tant
The Fall se doit d'être vu et vécu sur écran géant. Mieux : il se doit d'être découvert en public tant Tarsem s'est échiné à créer une merveille de conte purement cinématographique, d'une beauté renversante, s'adressant aussi bien aux esthètes contemplatifs qu'aux âmes d'enfant se nourrissant d'univers fabuleux.

Nous sommes à Los Angeles dans les années 20. La petite Alexandria s'est cassée le bras et s'ennuie ferme à l'hôpital. Elle y rencontre Roy, un cascadeur d'Hollywood immobilisé sur un lit suite à un accident de tournage. Comme il n'y pas grand chose à faire, Roy commence à raconter une grand histoire fantastique à la petite, puis profitera de sa fascination du récit pour la manipuler et l'aider malgré elle à se shooter aux médocs…

The Fall
 

Vous l'aurez compris, The Fall, avec son cascadeur blessé, son contexte, son histoire dans l'histoire, ses mensonges et manipulations, sa note d'intention évidente (une des premières scènes rappelle, par le biais d'une idée simple et grandiose, que le cinéma est une machine bizarre qui capture l'endroit pour projeter l'envers), est entièrement dédié au septième art, à l'imaginaire, à la mythologie, à l'évocation, bref à toutes ces choses que le grand public assimile dans la seconde et les experts dans la décennie suivante.

Pourtant, avec entre autres
Inglourious Basterds, on devrait être rassasié de ces cinéastes qui clament leur amouuuur au cinéma, d'autant plus qu'on se doute bien que s'ils sont cinéastes, c'est que le ciné c'est plutôt leur came (quoique dans certains lieux cela ne tombe pas forcément sous le sens). Le fait est que The Fall fonctionne sur les deux niveaux, en tant qu'hommage et œuvre indépendante (comme le Tarantino), et dieu sait si la chose n'est point aisée (Cf. les palettes de films exclusivement référentiels qu'on se coltine depuis quinze ans). Le projet pouvait être d'autant plus craint que le premier effort du pubard sur un long, The Cell, était certes réussi visuellement mais incroyablement lourd et calamiteux dans sa structure (et il y avait J.Lo, ce qui n'arrange rien, même en slip). A contrario, The Fall se révèle fluide, les bascules entre les deux univers n'alourdissent jamais le rythme, ce qui se passe dans l'un nourrissant l'autre (inspiration et création). Il serait de toutes manières difficile de s'ennuyer tant la pupille est constamment abreuvée de plans somptueux, de compositions dignes d'un Baraka accueillant le désir d'exil imaginaire façon  Tideland ou Pan's Labyrinth. Cette prouesse artistique et logistique amène bizarrement certains cinéphiles à parler de "pompage de Baraka", réflexe qui ne manque pas d'étonner quelques mois après la sortie d'un documentaire produit par François Pinault dans une optique de greenwashing qui empruntait bien plus au film de Ron Fricke sans que personne ne trouve à redire. D'autant que je n'ai pas souvenir dans Baraka d'un homme mourrant sur un matelas de flèche, d'une émouvante relation entre une petite fille au jeu incroyablement naturel et un homme désenchanté, ou d'une A-Team menée par Charles Darwin.

Des films aussi ambitieux esthétiquement que narrativement se faisant assez rares, vengez l'indifférence de nos distributeurs en vous précipitant dessus, vos yeux méritent bien ça après qu'on vous ait vendu la "beauté" du dernier Larrieu.

7/10
THE FALL

Réalisateur : Tarsem Singh
Scénario : Tarsem Singh, Dan Gilroy & Nico Soultanakis

Production : Tarsem Singh, Lionel Kopp, Nico Soultanakis…
Photo : Colin Watkinson
Montage : Robert Duffy
Bande originale : Krishna Levy
Origine : USA / GB / Inde
Durée : 1h57
Sortie française : Nan mais sortir un film de cinéma au cinéma, vous en avez de belle vous…




   

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