Les astronautes du cinéma - 1ère partie

Etoiles et toiles

Affiche Voyage Dans La Lune

A l’occasion de la sortie de Gravity, revenons en douze films sur plus d’un siècle d’images animées dans le vide du cosmos. Pleins feux sur ces pionniers qui ont ouvert et ouvrent encore les possibles de l’exploration spatiale.


En 1865, le Gun Club de Baltimore, célèbre rassemblement d’artilleurs qui a connu ses grandes heures lors de la guerre de Sécession, se lamente sur la paix durable qui touche les Etats-Unis. Son président Impey Barbicane fait part à ses collègues de son projet d’envoyer un boulet de canon sur la Lune. Les artilleurs philanthropes lèvent des fonds tout autour du monde pour l'occasion, accueillis partout avec enthousiasme et ne rencontrons l’opposition que d’un seul homme, le capitaine Nicholl. Conditions de lancement les plus favorables, date la plus propice, canon, projectile et explosif : rien n’est laissé au hasard, pas même le choix d’un site en Floride. Le Gun Club reçoit alors un télégramme du français Michel Ardan qui propose de fabriquer un projectile creux où il pourrait prendre place pour le voyage. Barbicane y est fermement opposé. S’il veut embarquer, Ardan devra convaincre l’opinion publique, puis Barbicane et Nicholl, qu’envoyer un homme dans l’espace est tout à fait faisable. 

L’idée qui préside au roman De La Terre A La Lune de Jules Verne paraît fantaisiste à quiconque a des notions d’astronautiques et un peu de bon sens, mais elle est en 1865 tout à fait plausible. C’est surtout le talent de Jules Verne pour convaincre de cette plausibilité, d’éprouver scientifiquement et historiquement toutes les techniques abordées, qui en fait alors un ouvrage de référence sur la question.

De La Terre A La Lune Affiche de l'adaptation de 1958 (1).

Art sur le point de naître mais préexistant à la conquête spatiale, le cinéma emprunta d’abord les chemins balisés par Jules Verne pour lancer ses premiers hommes sur la Lune avec la précision scientifique du début du XXème siècle. Il ajustera le tir au fur et à mesure sur la propulsion et les fusées, la gravité, les conditions de voyage dans l’espace, mais reproduira un schéma semblable intégrant la politique, les financiers privés et la figure du pionnier, aventurier et rêveur incorrigible. Le cinéma convertit surtout l’imaginaire en images mouvantes, marquant les esprits, convainquant à leur tour de la possibilité d’envoyer des hommes dans l’espace, et ce bien avant le lancement en orbite de Youri Gagarine le 12 avril 1961. Et le cinéma inspirera à son tour la littérature et la bande dessinée.

Le Voyage Dans La Lune


Il ne faut pas attendre plus tard que 1902 pour assister au premier triomphe d’astronautes de cinéma. Un autre français, Georges Méliès, reprend le postulat de Jules Verne dans le célébré court-métrage Le Voyage Dans La Lune.
Lors d’un colloque animé, le Professeur Barbenfouillis fait part à ses compagnons de son intention de voler vers la Lune grâce à un obus lancé par un canon géant. Cinq hommes décident de le suivre dans ce voyage. Nous assistons ensuite à la construction de l’obus, la fonte du canon et le lancement sur les toits de la ville (!). Les premiers hommes à marcher sur la Lune assisteront à un splendide clair de Terre et seront faits prisonniers par les Sélénites, habitants de notre satellite.
Méliès se fiche bien de la science. Il compte profiter des possibilités du nouveau médium pour en exploiter toute la magie et la poésie. L’arrivée dans l’œil de la Lune deviendra une image marquante, mais n’est qu’une infime part de cette fantaisie débridée qui tâte du burlesque : des astronomes farceurs aux allures de magiciens courent sur la Lune en habits de ville et n’hésitent pas à user de leur parapluie pour mater les autochtones.

Georges Méliès avait à l’époque produit une version colorisée à la main. Longtemps donnée pour perdue, la bobine très endommagée fut retrouvée à Barcelone en 1993 et put être restaurée pour être présentée au festival de Cannes de 2011. Pour l’occasion, le groupe Air composa une bande originale pour accompagner le court-métrage.



LE VOYAGE DANS LA LUNE
Réalisation : Georges Méliès
Scénario : Georges Méliès
Production : Georges Méliès
Photo : Michaut & Lucien Tainguy
Montage : George Méliès
Bande originale : Air (version restaurée)
Origine : France
Durée : 16 minutes
Sortie française : 1er septembre 1902



LA FEMME SUR LA LUNE

Affiche La Femme Sur La Lune

Dernier film muet de Fritz Lang, La Femme Sur La Lune n’a pas obtenu la place qu’il mérite dans la célébration de l’œuvre allemande du cinéaste. Il ne fut, il faut le dire, entièrement restauré qu'en 2007 par la Wilhelm Friedrich Murnau Fondation.

Inspiré du roman de Thea Van Harbou, que Fritz Lang retrouve au scénario après Metropolis, le film conte l’histoire de Wolf Helius, savant qui a l’intention d’embarquer pour la Lune afin de vérifier si la théorie de son vieil ami le professeur est vraie : il y aurait de l’or sur notre satellite. La nouvelle arrive aux oreilles d’un conglomérat de businessmen qui envoient l’énigmatique Turner, un bad guy caméléon à ses heures, pour forcer la main à Helius et profiter de ses travaux. Le mercenaire embarquera avec lui, accompagné du vieux professeur, de l’ingénieur ami d’Helius et de la fiancée de celui-ci dont Helius est secrètement amoureux.

La Femme Sur La Lune


La Femme Sur La Lune
est le premier film sur l’astronautique qui bénéficie d’un background documenté. Aussi minutieux que sur Metropolis, Fritz Lang s’assura le conseil du physicien Herman Oberth qui rejoindra plus tard les travaux sur la fusée V2 pour le régime nazi. Il était alors l’auteur d’un ouvrage sur les possibilités de voyages spatiaux qu’offraient les fusées. Le lancement de l'engin qui ouvre la deuxième partie du film bénéficie donc d’une attention particulière, déclinant pour la première fois un compte à rebours, idée qui deviendra un des rituels les plus marquants de la conquête spatiale. On ressent parfaitement la force de la poussée au décollage, l’appréhension et l’excitation qui étreignent les futurs astronautes. Certains efforts d’imagination et d'idées visuelles pour combler la technique font sourire aujourd’hui, notamment les lanières au sol et au plafond pour lutter contre l’apesanteur. La Lune est quand à elle bien commode à vivre, contenant assez d’oxygène pour qu’on puisse y courir sans combinaison et une gravité comparable à celle de la Terre.

La Femme Sur La Lune


Fritz Lang met autant de soin à installer le souffle nécessaire à son histoire qu’à la documenter. Le voyage, puis le segment sur la Lune ne sont que le prolongement de la première heure qui développe les personnages et l’imbroglio qui les réunira dans l’espace. Le cinéaste offre une belle démonstration du niveau de perfection auquel était parvenu le cinéma muet avant de tirer sa révérence. La musique accompagne superbement les images, les cartons sont presque inutiles tant les acteurs sont expressifs et l’histoire est dotée d’un parfait équilibre qui rend les deux heures quarante de métrage à peine perceptibles.
L'auteur de M Le Maudit aime explorer les rapports entre ses personnages et se plaît particulièrement à les livrer à ce milieu extrême qui ne fera qu’exacerber leurs traits de caractères. La Femme Sur La Lune a aussi pour lui un touchant romantisme, propre au cinéma allemand de l’époque, qui culmine dans un final superbe. Profondément avant-gardiste, l'oeuvre ne comporte pas seulement une femme astronaute, mais aussi un gamin, Gustav.

FRAU IM MOND
Réalisation : Fritz Lang
Scénario : Fritz Lang & Thea Von Harbou d'après son oeuvre
Production : Fritz Lang
Photo : Curt Courant, Oskar Fischinger, Konstantin Irmen-Tschet
Direction artistique : Otto Hunte 
Bande originale : Willy Schmidt-Gentner
Origine : Allemagne
Durée : 2h36



DESTINATION... LUNE !

Destination Lune

Destination… Lune ! est une production George Pal, à qui on devra La Machine A Explorer Le Temps et La Guerre Des Mondes. Robert A. Heinlein (l'auteur de Starship Troopers) participe au scénario en tant que consultant, boosté par ses romans Rocket Ship Galileo et The Man Who Sold The Moon.
Destination... Lune ! décrit un voyage vers la Lune dix-neuf ans avant celui de la mission Apollo 11 de 1969. Avec grand souci de réalisme, le film nous fait suivre toutes les phases de l’expédition et les difficultés rencontrées.
Contraints de lever des fonds privés pour financer leur idée folle, le Dr Cargraves et le Général Thayer font appel à Jim Barnes, grand industriel PDG de Barnes Aircraft (John Archer, american hero de l'histoire) pour convaincre les investisseurs. Puis l’expédition est menacée par l’opinion publique (la peur du nucléaire) et le gouvernement US, pas rassuré par cette entreprise privée ; les trois compères, accompagnés d’un quatrième larron, décident donc de prendre le large tant qu'ils le peuvent.

On suit cette épopée prématurée dans un cadre contemplatif et documenté (pour l’époque) : décollage difficile, sortie dans l’espace avec expulsion d’un astronaute, premier pas sur la Lune et conditions de retour étirant le suspens.

Destination Lune


Destination... Lune ! allie aplomb technologique et un charme magique, témoignant que l’odyssée vers la Lune était encore un rêve pour l’humanité, mais cette fois accessible. Les fusées V2 étaient alors connues, autant que la force de propulsion, mais aucun satellite n’avait encore été lancé. Malgré l’effort d’exactitude scientifique, on peut relever quelques écueils : une apesanteur pas toujours maîtrisée (le réveil) ou oubliée (un astronaute lance un matelas sur le sol de la Lune), le retournement de la fusée prévu pour le retour ou encore l’absence totale de réalisme dans l'improvisation d'une mission comme celle-ci, quand les Apollo nécessiteront des mois de préparation. Destination… Lune ! est toutefois riche d’un contexte très bien utilisé : les Etats-Unis étant déjà engagés dans la Guerre Froide avec l’URSS depuis 1947, l'aspect patriotique s'en trouve exacerbé à l'écran. Barnes parvient à convaincre les industriels en déclarant que "Le premier pays qui utilisera la Lune pour lancer des missiles contrôlera la Terre". Plus tard, le docteur prétend même s’emparer de cette planète pour le bien de l’Humanité. Si on peut imaginer que le cœur y a toujours été, cette phrase dans la bouche de Neil Armstrong serait nettement moins bien passée. Le film expose aussi la peur du nucléaire, qui s’installera durablement dans la SF des 50’s.

Destination Lune


Le long-métrage d'Irving Pichel bénéficie d’un visuel lunaire convaincant et de combinaisons flashy orange qui ne manquèrent pas d’inspirer Hergé pour son dyptique de Tintin Objectif Lune / On A Marché Sur La Lune. Il présente aussi une trouvaille originale : un petit documentaire de vulgarisation en animation, avec Woody Woodpecker (dessiné par son papa Walter Lantz) expliquant aux financiers potentiels les principes de la fusée et de la gravitation. Un passage joliment ironique, lorsqu’on considère que l’aspect documentaire du film contribua à installer la possibilité d’un tel voyage dans l’imaginaire collectif américain.
Destination... Lune ! repartit avec l’Oscar des meilleurs effets spéciaux et une nomination pour le décor. Une honnête récompense pour un beau travail souligné par Technicolor superbement mis en valeur.

destination moon
Réalisation : Irving Pichel
Scénario : Alford Von Ronckel, James O'Hanlon & Robert Heinlein
Production : George Pal
Photo : Lionel Lindon
Montage : Duke Goldstone
Bande originale : Leith Stevens
Origine : USA
Durée : 1h32
Sortie américaine : 27 juin 1950



2001, L'ODYSSÉE DE L'ESPACE

Affiche 2001, L'Odyssée De L'Espace

"Je n’aime pas beaucoup parler de 2001 parce qu’il s’agit essentiellement d’une expérience non verbale" disait Stanley Kubrick.

Et il est aussi très difficile d’en parler sans énoncer des évidences, comme dire qu’il existe un avant et un après 2001, L’Odyssée De L’Espace dans la représentation de l’astronaute au cinéma. Issu de la collaboration entre Kubrick et l’écrivain Arthur C. Clarke, le film s’ouvre sur un monolithe noir qui apporte à nos ancêtres le secret de leur suprématie dans le règne animal. Des millions d’années plus tard, la découverte d’un signal extra-terrestre engage l’épopée de deux astronautes, chargés sans en être prévenus d’atteindre ce signal. Mais leur voyage vers les propriétaires du monolithe sera perturbé par Hal, l’ordinateur de bord.

2001, L’Odyssée De L’Espace dégage une authenticité et un rythme quasi hypnotique qui entraînent le spectateur, en dépit de tout facteur narratif, dans un ballet de ressentis immédiats. On se souvient longtemps après du voyage paisible mais étrange du docteur Floyd, seul passager d’un transport en état d’apesanteur. Du lent ballet des transports dans l’espace. Du véhicule flottant près du cratère lunaire de Clavius. Du jogging de Poole dans le couloir de la centrifugeuse du vaisseau Discovery. On ressent la répétition de leur quotidien, l’isolation des deux astronautes au sein de leur propre vaisseau contraints de se retirer dans une capsule pour échapper au contrôle de Hal, et enfin la solitude de Dave Bowman lors de l’opération de récupération du corps de son compagnon dans l’espace. A chaque instant, on se surprend à se demander comment Stanley Kubrick a su à ce point nous immerger dans chacune de ses expériences.



La méticulosité du réalisateur du Dr Folamour dans le rendu scientifique de son film a bien sûr contribué à ce ressenti, mais il a surtout su bien s’entourer pour y parvenir : les artistes supervisant les effets spéciaux (Wally Veevers, Tom Howard et les jeunes Américains Douglas Trumbull et Con Pederson) viennent d'horizons différents et apportent au film des maquettes et décors magnifiés par les techniques mises au point pour un tournage souvent qualifié de marathon (2). Optiques et mécaniques, les trucages dirigés par le cinéaste multiplient les innovations mais en s’intégrant parfaitement dans la vraisemblance scientifique. Ils donnent vie à ce qui relevait encore de l’ordre de l’imaginaire (navettes spatiales, stations spatiales orbitales…) d'où émane malgré tout un sentiment de quotidienneté. Une intention que l'on retrouve jusque dans la reproduction d’un espace silencieux, sans bruits de moteur, où seule la respiration des astronautes et la musique d’Alex North viennent briser un silence de mort.

2001: A SPACE ODYSSEY
Réalisateur : Stanley Kubrick
Scénario : Stanley Kubrick & Arthur C. Clarke d'après son roman 
Production : Stanley Kubrick & Victor Lyndon 
Photo : Geoffrey Unsworth
Montage : Ray Lovejoy 
Origine : USA / GB 
Durée : 2h21 
Sortie française : 27 septembre 1968



LES PREMIERS PAS SUR LA LUNE

L'Homme sur la Lune

La littérature, puis le cinéma ont aidé l'opinion publique à envisager la possibilité d’un voyage sur la Lune, la fiction inspirant la réalité dans l'élaboration de moyens qui rendront possible le premier alunissage de la mission Apollo 11.
Le 21 juillet 1969, l’astronaute Neil Armstrong pose le pied sur la Lune, suivi de près par son collègue Buzz Aldrin. Une opération de retransmission par satellite sans précédent est mise en place. Sur l'ensemble de la planète, il est estimé que 500 millions de téléspectateurs et d'auditeurs ont suivi en direct l'alunissage et la marche du premier homme sur la Lune, mais surtout la pose du drapeau américain sur le sol lunaire. Cela grâce à une caméra fixe installée sur le hublot droit du module lunaire qui permettait de voir la plateforme de sortie, l'échelle, un pied et une partie du sol lunaire. Activée pendant la descente des neuf marches de Neil Armstrong, elle put immortaliser les premières images de la Lune. 



Dès lors, des théories naissent sur le fait que ces images seraient des scènes tournées sur Terre, fondées entre autres choses sur l’analyse de détails qui contrediraient certaines lois lunaires. Au départ peu relayées, les théories du Moon Hoax connaîtront un boom suite aux affaires de dénonciation de la Guerre du Viet Nam et au scandale du Watergate, puis trouveront en Internet un vaste terrain de propagation. 

En 1978, le film Capricorn One de Peter Hyams illustre un faux débarquement sur Mars, reprenant à son compte l'idée de la mise en scène spatiale. La plus intéressante des manifestations du hoax demeure le documenteur Opération Lune réalisé par William Karel diffusé sur Arte le 16 octobre 2002 dans le cadre d’un soirée thématique sur le pouvoir des images. On y apprenait que Stanley Kubrick aurait dirigé le film du 21 juillet 1969 et que les membres de l’équipe de tournage auraient été dessoudés par les services secrets suite à une bourde du Président Nixon. Un document obligatoire pour quiconque doute de la facilité à falsifier des documents et des témoignages pour servir un propos. La persistance de ces théories en dépit des réfutations met merveilleusement en exergue la porosité de la frontière entre Hollywood et la conquête spatiale. La rumeur d'un fake par Kubrick continue par ailleurs à se répandre avec une régularité de métronome (3), et ce en dépit des intentions claires du faux documentaire.





LES NAUFRAGÉS DE L'ESPACE

Affiche Les Naufragés De L'Espace

Suite à une mission visant à tester les conditions de vie dans l’espace, trois astronautes rencontrent un problème lors de leur retour sur Terre. Ils ne peuvent plus allumer leurs rétrofusées et restent en coincés en orbite. Le temps est compté avant qu’ils ne succombent au manque d’oxygène, il faut envisager si une mission de sauvetage peut-être lancée. Décision qui sera finalement prise pour éviter de se mettre à dos l’opinion publique. L’astronaute Ted Dougherty doit remorquer les naufragés dans une mission lancée dans les plus bref délais et dans des conditions météorologiques catastrophiques. Tous les éléments sont donc parfaitement rassemblés pour que rien ne se passe pas comme prévu.

Les Naufragés De L'Espace


Maintenant que l’Homme a marché sur la Lune, il apparaît plus que nécessaire de réaliser un grand film se déroulant dans l’espace et qui côtoierait des terres moins ésotériques que le chef-d’œuvre de Kubrick et Arthur C. Clarke.
Plus qu’un pellicule sur les astronautes, Les Naufragés De L’Espace est de ces films qui initient le scénario catastrophe tel qu’il sera perpétué dans les années 70, puis parodié par la suite. Mais il est heureusement servi par un scripte qui distille le suspens jusqu’aux dernières images, et ce sans aucun recours aux scènes d’action. Des allers retours fréquents entre Houston et les hommes coincés en orbite viennent sans cesse rappeler l’urgence du sauvetage. Une urgence amplifiée par le rapprochement du spectateur avec l'équipage lors de scènes simples et émouvantes, servies par des Richard Crenna, James Franciscus et Gene Hackman bluffants de sincérité et très bien secondés par Gregory Peck et David Janssen (le Richard Kimble de la série Le Fugitif). Les scénaristes Margo Simon et Matlin Caiden (auteur de la nouvelle originelle) dispensent les divers éléments utiles au récit avec maestria, ne s’embarrassant jamais de sur-explications et misant avant tout sur l'efficacité. L’absence de musique et la restitution de sons d’ordinaire évités au cinéma (comme les respirations) caractérise une volonté documentaire générale, soutenue du moins par la cohérence générale de l'objet et l'aspect vraisemblable des scènes de vol et de lancements. Après le 21 juillet 1969, il valait mieux se garantir d'un certain niveau d'exactitude.

Les Naufragés De L'Espace


S’il se déroule en partie sur Terre, Les Naufragés De L’Espace offre néanmoins de belles sorties dans l’espace et crée quelques images appelées à faire école, tel l'astronaute se sacrifiant pour sauver la mission et s'éloignant dans le cosmos. On retrouve le même background contemplatif des précédents essais, avec de notables améliorations dans le rendu des scènes spatiales, plus fluides et opérant sur plusieurs angles. Avec en prime un étonnant final mettant en image une alliance de fortune entre un cosmonaute russe et un astronaute américain. Un message simple et discrètement intégré qui tranche à une époque où le ciel n'en a pas fini d'être un lieu stratégique de la Guerre Froide.
Les Naufragés De L’Espace est un beau reste du cinéma des 60’s, qui prophétise bien malgré lui les difficultés que rencontrera l'équipage de la mission Apollo 13 quelques mois plus tard...

Marooned
Réalisation : John Sturges
Scénario : Martin Caidin, Mayo Simon
Production : Frank Capra Jr. , M.J. Frankovitch
Photo : Daniel L. Fapp
Montage : Walter Thompson
Origine : USA
Durée : 2h14
Sortie française : 11 mars 1970


A suivre...


(1) Sortie en 1958, l'adaptation de Byron Haskin oppose Barbicane (Joseph Cotten) et Nicholl (George Sanders). Ardan n'y apparaît pas mais un rôle à part entière est réservé à Jules Verne.

 

(2) Comme tout magicien devant dévoiler ses tours, Kubrick a été très peu loquace sur la fabrication de 2001, mais les curieux pourront se pencher sur la bible The Making Of Kubrick's 2001 diablement instructif, longtemps épuisée mais désormais disponible en ligne.

(3) Elle fut récemment développée dans le documentaire consacré à Shining, Room 237.